Un gars du Sud à l'Université américaine : Peut mieux faire
Cinéma

Un gars du Sud à l’Université américaine : Peut mieux faire

Un gars du Sud à l’Université américaine est un divertissement pour le plus grand nombre, mais qui agit avec justesse et qui arrive au bon moment.

Dans les grandes vérités rarement dites, on trouve celle-ci: si vous ne pouvez pas voyager, allez au cinéma. Le billet coûte moins cher. En regardant le film Un gars du Sud à l’Université américaine, de Saïd Hamed, et sachant qu’il a remporté le plus gros succès de toute l’histoire cinématographique égyptienne, on voyage à peu de frais, et on en apprend un peu plus sur le Caire, sur les jeunes Arabes, sur ce qui les fait rire en ce moment et sur ce qui nous différencie. Mais en chaussant les lunettes de l’éthnologue, on a du mal à savoir si ce film est une exécrable comédie romantique pour adolescents ou une farce populaire à message. Mais l’un n’empêche pas l’autre.
Bon élève, Kafta (Mohamed Henedy) quitte son village du Sud de l’Égypte pour aller étudier à l’Université américaine du Caire. Que le paysan bouseux, vilain petit canard mal fagoté devienne le gars le plus cool de l’Université, c’était à prévoir. Téméraire et intelligent, il surmonte tous les «obstacles»: la grande ville, la culture américanisée, la femme libérée, les cigarettes, les partys, l’alcool, les rebuffades et autres frictions politiques.
Le film ressemble étrangement à Femmes et… Femmes (énorme succès au Maroc): une production populaire, exécutée sans charme ni raffinement particulier, mais qui appuie à gros traits sur certains points sensibles, sociaux et politiques. Un divertissement pour le plus grand nombre, mais qui vise juste et qui tombe au bon moment. À l’heure de l’américanisation grandissante, le fossé devient abyssal entre la culture égyptienne ancestrale (qui se base encore sur la tradition orientale du conte façon Youssef Chahine, culture orale représentée par le père de Kafta) et celle d’une génération qui boit du Coke, qui regarde CNN et qui se chausse Nike. D’ailleurs, cela donne lieu à une scène très Jacques Demy, plutôt déroutante, où un groupe d’étudiants danse dans un centre commercial du Caire et vante, sur un ton ironique, les mérites de Versace et du Casual wear
Le message double de ce film explique assez bien son succès: d’un côté, on piétine le drapeau sioniste dans la seule scène dramatique du film; et, de l’autre, on enlève une femme voilée, soumise à la dictature de son frère. Restons Arabes et Égyptiens, mais évoluons. Sans tout gober d’une culture autre, on peut se débarrasser de certains comportements arriérés qui minent l’évolution d’un peuple.
Il faut noter enfin que l’acteur, avec son visage lunaire de Peter Lorre comique, apporte tout le ressort et l’énergie nécessaires à ce film lourd qui veut éveiller les consciences en les divertissant.
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