High Fidelity : Grande écoute
Contrairement à ce que sa bande-annonce pourrait laisser croire, High Fidelity, de Stephen Frears, n’est ni une comédie sentimentale pour adolescents attardés, ni une vaste pub pour une bande sonore compilant des succès d’une autre époque.
Contrairement à ce que sa bande-annonce pourrait laisser croire, High Fidelity n’est ni une comédie sentimentale pour adolescents attardés, ni une vaste pub pour une bande sonore compilant des succès d’une autre époque. En fait, il s’agit plutôt: 1) d’une excellente adaptation du roman-culte de Nick Hornby; 2) du meilleur film américain de Stephen Frears; 3) d’une comédie étonnamment adulte et intelligente sur le désir masculin et la vie de couple; 4) d’une oeuvre qui est appelée à devenir pour les amateurs de disques ce que La Nuit américaine est devenue pour les cinéphiles; 5) du meilleur film jamais fait sur les gens qui ont la manie de répertorier les choses par listes de cinq («Les 5 meilleurs chanteurs de tous les temps»; «Les 5 meilleures chansons d’amour ou de mort»; «Les 5 meilleures face A sur un 45 tours des années 60»…).
Rob Gordon (John Cusack) est un maniaque de rock qui gère un magasin de vieux 33 tours où il passe ses journées à dresser des listes de préférences avec ses deux employés: Barry (Jack Black), une grande gueule méprisante, qui rêve de devenir chanteur de blues; et Dick (Todd Louiso), un timide congénital, qui se confond parfaitement avec le papier peint. Mais le jour où Laura (Iben Hjele, de Mifune) l’abandonne pour un voisin (Tim Robbins), Rob se met à réfléchir sur sa vie amoureuse et à compiler sa liste des «5 ruptures les plus douloureuses de sa vie»: de la maniacodépressive (Lili Taylor) qui s’était jetée dans ses bras pour en oublier un autre, à la beauté inaccessible (Catherine Zeta-Jones) qu’il rêve toujours de reconquérir. Mais cette accumulation de souvenirs l’amènera-t-il à apprendre de ses erreurs?
Avec son héros névrotique qui s’adresse constamment à la caméra, sa structure en forme de flash-back répertoriant les déceptions amoureuses, et son ton de comédie romantique aigre-douce épicée de commentaires sociaux, High Fidelity rappelle féquemment Annie Hall (Bruce Springsteen vient même y faire une petite apparition qui évoque celle de Marshall McLuhan dans le film de Woody Allen). Si la parenté entre les deux oeuvres est évidente, elle ne devient toutefois jamais encombrante, car la passion du héros, l’abondance de références musicales et les clins d’oeil à la culture pop des 20 dernières années donnent rapidement au film une personnalité distinctive et rafraîchissante.
Certes, on peut regretter quelques maladresses: le jeu parodique de Tim Robbins dans un rôle caricatural; une mise en scène fonctionnelle qui se contente trop souvent d’adhérer à un scénario superbement construit; et un happy end qui noue un peu trop facilement toutes les trames narratives du film.
Ces réserves n’entament toutefois pas le plaisir distillé par ce portrait juste, drôle et sensible de la psyché masculine, qui se regarde comme on écouterait ses disques préférés un jour de pluie. Et qui renvoie fatalement chaque spectateur à ses propres goûts, à ses propres listes et à ses propres histoires d’amour…
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