Human Traffic : Le party

Human Traffic, le premier long métrage du jeune (25 ans) Justin Kerrigan, est un film qui embrasse parfaitement la folie, l’humour et le rythme de vie de ses protagonistes: un petit groupe d’amis du pays de Galles, qui – entre les sermons usés de leurs parents, deux jobs minables et un avenir incertain – vivent pour les soirs où ils peuvent aller s’éclater ensemble à l’ecstasy, aux raves locaux. D’ailleurs, le film bouge, tourne et vire à un rythme si hallucinant qu’à côté, Trainspotting a presque l’air d’un documentaire sur les dinosaures…
Justin Kerrigan, qui connaît intimement ce milieu et s’est inspiré de ses amis pour créer ses personnages, dynamise la p’tite vie de ses fêtards en déployant tout l’éventail des effets cinématographiques: images accélérées et ralenties; lentilles déformantes et angles bizarroïdes; voix off et monologues à la caméra; images mentales et scènes fantasmées à la Buñuel (lorsque l’un d’eux dit que son patron l’encule, on voit littéralement une sorte d’Hitler apparaître et le prendre par derrière!). Bref, c’est souvent cru et gratuit, mais extrêmement tonique et vivant, et il est presque physiquement impossible de s’y ennuyer une seule seconde. D’autant que Kerrigan brode sur un genre passablement usé – le-film-de-jeunes-qui-s’éclatent – quelques motifs pour le moins inusités (dont une intrigue secondaire étonnante tournant autour des craintes d’un garçon persuadé qu’il est déjà impuissant!).
On pourrait bien sûr reprocher au film la minceur de son scénario où s’entremêlent, selon un schéma classique, les destins de six ou sept personnages sur deux nuits. Mais la banalité des situations et la virtuosité de la réalisation correspondent en fait étrangement aux vies de ces jeunes tiraillés entre un quotidien morne et des vies secrètes intenses. Révélateur sous ses dehors superficiels, et peut-être moins facile qu’il n’en a l’air, Human Traffic est un film qui se voit comme une plongée ludique dans les fantasmes d’une certaine jeunesse: une sorte de doumentaire halluciné sur la vie intérieure d’une génération pour qui la réalité n’est qu’un rêve dont il faut s’échapper de temps à autre.

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