Hochelaga : Les manipulateurs sont parmi nous
Depuis qu’il a été présenté en compétition officielle au Festival des films du monde de Montréal, Hochelaga de Michel Jetté a créé un engouement instantané. Et pour cause, on a beaucoup souligné le fait que le deuxième long métrage de Jetté dépeignait une réalité faisant partie du paysage québécois mais bizarrement absente jusque-là au cinéma: les bandes de motards criminalisées.
Depuis qu’il a été présenté en compétition officielle au Festival des films du monde de Montréal, Hochelaga de Michel Jetté a créé un engouement instantané. Et pour cause, on a beaucoup souligné le fait que le deuxième long métrage de Jetté dépeignait une réalité faisant partie du paysage québécois mais bizarrement absente jusque-là au cinéma: les bandes de motards criminalisées.
Marc (Dominic Darceuil) est un jeune délinquant sans envergure mais qui en viendra, par la force des choses, à côtoyer le monde des motards et à en épouser la cause. Massif (Ronald Houle), la brute au sang froid, et Finger (David Boutin), l’éxécuteur des basses oeuvres des Dark Souls, seront les initiateurs de Marc dans cet univers fermé et impitoyable. En fait, c’est Marc lui-même qui se mettra le doigt dans l’engrenage infernal, malgré les avertissements incessants de sa mère (Michèle Péloquin), qui s’est elle-même retrouvée dans sa situation bien des années auparavant…
Quelques jours seulement avant sa sortie en salle, le réalisateur faisait un saut à Québec pour assurer la promotion de son film. Visiblement heureux de son petit dernier, Jetté avoue que si ce dur milieu sert de toile de fond, il n’en demeure pas moins que le véritable sujet de Hochelaga va beaucoup plus loin et explore plutôt d’autres pistes.
«Hochelaga était en fait un prétexte pour faire un film sur la quête d’identité d’un jeune homme. Puis, avec le temps, la trame de départ s’est transformée et cette quête est alors devenue sous-jacente et a commencé à nourrir le reste de l’histoire. Mais ce qui est vraiment ressorti au final, ce sont les thèmes de la confusion et de la manipulation. Je voulais surtout démontrer que si on est appelé à pénétrer dans des structures de pouvoir et qu’on se situe à la base de ces structures, on est souvent incapable de faire une lecture claire des enjeux en place.»
Si Jetté ne prétend nullement faire un portrait fidèle de la situation des gangs de moards au Québec avec Hochelaga, il reste qu’il a longuement planché sur l’élaboration du scénario et la mise au point de nombreux détails relatifs à cet univers très codé et hermétique. C’est pourquoi Jetté s’est donné quatre ans avant de finaliser ses recherches, allant voir du côté des clubs non criminels pour régler l’aspect humain de ses personnages. Il tenait de cette façon à éviter à tout prix le lot de clichés et de stéréotypes que peut colporter un tel sujet. Et force est d’admettre qu’il a gagné son pari. Car Hochelaga va beaucoup plus loin que la simple description d’une bande de criminels à moto, penchant plutôt vers la longue valse-hésitation entre la fascination et la répulsion d’un jeune homme qui se cherche. Une belle réussite, due aussi à l’impressionnante galerie de personnages secondaires fort crédibles et toujours nuancés. Les zones d’ombre sont ainsi fréquentes et amènent un certain aura, loin de la complaisance.
«On n’a pas voulu donner de morale à ce film et je crois que les gens le verront bien, même si certains pourraient en ressortir troublés ou choqués. Mais je crois surtout que le film pourra enclencher une réflexion sur la manipulation, qu’elle soit au niveau politique ou financier. C’est là que se trouve son propos.»
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