L’Invention de l’amour : Quartier chaud
Antoine (David La Haye) fume des cigarettes, broie du noir et écrit. Quand on entend un air de musique grecque, ça veut dire qu’il pense à son ex, Matina (Irène Stamou). Un jour, il atterrit sur le capot de la voiture de Charlotte (Pascale Montpetit)…
Antoine (David La Haye) fume des cigarettes, broie du noir et écrit. Quand on entend un air de musique grecque, ça veut dire qu’il pense à son ex, Matina (Irène Stamou). Un jour, il atterrit sur le capot de la voiture de Charlotte (Pascale Montpetit), maman d’un petit Jules, amoureuse de Joe (Andreas Apergis) et propriétaire d’une friperie rue Saint-Denis. Passion fulgurante et déchirante. Antoine a toujours Matina en tête, mais il a les mains qui se baladent entre Charlotte et Elizabeth (Delphine Brodeur), Irma-la-douce à mi-temps. L’Invention de l’amour, en compétition au FFM, est un premier long métrage de Claude Demers, auteur de courts métrages tournant autour de la passion amoureuse, dont Une nuit avec toi et Le Bonheur.
Bien, bien, bien… Y a-t-il un microclimat au-dessus du Mile-End et du Plateau-Mont-Royal pour que toute histoire d’amour y soit forcément intense? Quand on aime dans ces coins-là, c’est sauvage. On se déchire rue Saint-Urbain, on se prend les fesses dans les ruelles, et on baise comme des damnés dans des appartements avec trop de portes, des moulures partout et des voiles diaphanes aux fenêtres… Des cinéastes épris de la Nouvelle Vague seraient-ils encore en train d’y chercher leur St-Germain-des-Prés, à moins que ce ne soit la Bastille? Cela n’étant qu’une considération géographique parallèle, il reste que L’Invention de l’amour donne rapidement une impression de déjà-vu. Déjà passé par là. Du Charles Binamé adjacent. Demers nous parle d’amour, tous azimuts: l’amour-passion entre Charlotte et Antoine, qui prend beaucoup de place, mais aussi le grand amour entre Antoine et Matina, l’amour-amitié entre Elizabeth et Charlotte, l’amour qui dure entre Charlotte et Joe, l’amour filial entre Charlotte et son fils, l’amour sans engagement entre Elizabeth et Antoine et une bonne dose d’amour-miroir, parce que charité bien ordonnée commence par son nombril.
Pour illustrer ces coups de coeur, Demers définit les personnages autour de leur aptitude à la sensualité. Ce qui est plutôt bien vu. Les scènes d’amour sont élégamment charnelles, avec une belle lumière estivale sur les peaux veloutées. Les trois personnages principaux (Montpetit, La Haye et Brodeur) s’abandonnent avec un délice évident. Mais leur générosité ne suffit pas à combler un scénario vide. Dialogues que l’on veut courts et marquants, mais qui ressortent anémiques et sans imagination; personnages volontairement flous qui finissent par être inintéressants à force d’inconsistance; longues scènes d’amour qui veulent gommer la notion du temps et qui aboutissent justement au contraire: même si, en effet, à chaque nouvelle histoire, l’amour se réinvente, on ne peut pas poser la grille du Dernier tango à Paris à tous les coups de reins sur pellicule! Dans ce cas-ci, il manque une situation, de l’érotisme, du souffle, de la peur, de l’urgence et du danger. Narcissisme et esthétisme ont pris la place du vertige.
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