Hitchcock et l’art:coïncidences fatales : La griffe du maître
Comme deux roses d’Angleterre. Assises le dos bien droit sur un petit canapé du Musée des beaux-arts, Janet Leigh, actrice légendaire de Psycho, et Patricia Hitchcock, fille d’un maître du cinéma, ressemblent aux deux soeurs d’Arsenic et vieilles dentelles: polies, proprettes, bavardes et très enjouées.
Comme deux roses d’Angleterre. Assises le dos bien droit sur un petit canapé du Musée des beaux-arts, Janet Leigh, actrice légendaire de Psycho, et Patricia Hitchcock, fille d’un maître du cinéma, ressemblent aux deux soeurs d’Arsenic et vieilles dentelles: polies, proprettes, bavardes et très enjouées. Présentes pour lancer la grande exposition Hitchcock et l’art, audit Musée, elles se remémorent avec délice des anecdotes sur Alfred Hitchcock: la fois où il avait offert un dîner où tout était bleu, celle où il avait envoyé un cheval dans la loge d’un ami acteur au théâtre, comment il barbouillait de maquillage le visage de sa fille alors qu’elle dormait… Le maître du suspense avait un humour absurde et très british. Chose rare: on le voit, au cours de l’exposition, faire des facéties dans des films personnels. Pour Patricia Hitchcock, Notorious (Les Enchaînés) reste son film préféré et celui qui s’approche le plus de la perfection; mais elle remarque que les oeuvres de son père ont des vies cycliques, suivent des modes et, qu’en ce moment, c’est plutôt The Birds qui tient le haut du pavé. Miss Leigh, plus hésitante, avoue un faible pour Strangers on the Train, "un film en noir et blanc, mais avec beaucoup de zones grises", lâche-t-elle. Ni l’une ni l’autre n’ont apprécié la version-hommage de Psycho par Gus Van Sant : "Je ne suis même pas allée à la première, je ne voulais pas le voir et je n’ai rien à faire avec ce film", appuie Janet Leigh. Patricia Hitchcock, quant à elle, a écouté Van Sant lui parler de ce projet, mais elle déplore cette copie: "Je n’ai toujours pas compris pourquoi il voulait faire une reproduction, qui en plus n’est pas aussi exacte qu’on le dit! Il a même fait construire une nouvelle maison!"
Afin que tous les journalistes l’entendent bien, Miss Leigh crie soudain d’une voix aiguë, en se levant quelque peu de son canapé: "Non, le couteau ne m’a jamais touchée!". Dans cette célébrissime scène de douche, que l’on retrouve dans un décor de motel reconstitué dans l’expo, l’actrice a passé une semaine dans la baignoire pour 49 secondes de terreur cinématographique. Elle décortique son rapport avec Hitchcock et décrit toute cette scène dans un livre datant de 1995, Psycho; Behind the Scenes of the Classical Thriller. Madame Hitchcock, réellement enchantée par cette exposition unique au monde, qui classe son père, fou d’art, comme un des maîtres auprès de Magritte, de Rossetti, d’Edward Hopper ou de Dali, prépare, elle aussi, un livre pour mai prochain sur sa mère, Alma Reville, monteuse et collaboratrice du réalisateur.
Le ciseaux de Dial M for Murder, le sac à main jaune de Marnie, l’érotisme des blondes, la terreur des ambiances, le graphisme des décors: l’univers des films d’Hitchcock est parfaitement complété par des oeuvres d’artistes du XIXe et du XXe. Superbe expo que Beaubourg veut déjà, en juin 2001. En sortant, on peut acheter un tapis de souris à son effigie, un jeu de Clue Hitchcock, la maison de Norman Bates à construire, ou des oiseaux empaillés. On peut aussi filer ventre à terre revoir tous les chefs-d’oeuvres du maître…
Musée des beaux arts
Du 16 novembre 2000 au 18 mars 2001