Rembrandt : Scènes domestiques
Il est fréquent que le septième art s’intéresse aux peintres illustres aux destins tourmentés et à la réputation malmenée.
Il est fréquent que le septième art s’intéresse aux peintres illustres aux destins tourmentés et à la réputation malmenée. Cela s’explique d’un côté par la vanité de l’homme moderne qui cherche toujours à réhabiliter et à ériger en maîtres ceux que ses ancêtres avaient parfois mal pesés, leur renvoyant du coup une accusation d’ignorance. Et par ailleurs, il y a là un excellent ressort dramatique qui s’applique à suivre un être mal compris, au pénible parcours.
Le cas Rembrandt en est un parfait exemple. Lorsque le réalisateur Charles Matton, lui-même peintre à ses heures, signe la biographie de Rembrandt, il y appose le sceau du XXe siècle. Il construit son personnage sur le prototype de la victime. Rembrandt était bon et tolérant (contre la peine de mort, amateur de tavernes et ami des Noirs), mais son génie et sa largesse d’esprit détonnaient sur l’univers inculte et mesquin de son époque. Des preuves? Il n’y a que ça.
Alors âgé de 27 ans, Rembrandt (le charismatique Klaus Maria Brandauer), fils de meuniers, s’installe dans l’Amsterdam du XVIIe siècle. Il devient la coqueluche de ceux que l’on dit de bonne compagnie et qui se chargent de bien garnir son carnet de commandes. On le trouve bon peintre et insolent, mais jamais il n’est question de ce qui le distingue des autres. Très vite, il s’éprend de Saskia Uylenburgh (Johanna ter Steege) qui s’y reprendra à quatre fois avant de lui faire un enfant, et de mourir dans d’atroces souffrances.
Visiblement peiné, le peintre exorcisera son deuil dans une aventure avec sa domestique. Il n’en fallait pas davantage pour faire jaser dans les couloirs. Les notables arrêtent net les commandes et se mettent à trouver de sérieux défauts à la technique (trop d’ombres, trop de peinture) de l’artiste. Entêté, Rembrandt leur donnera de quoi nourrir les ragots puisqu’il s’entichera d’une autre domestique, Hendrickje Stoffels (Romane Bohringer). Le procès moral aura raison de l’homme qui, bientôt, dilapidera tous ses biens pour s’offrir à manger. On l’aura compris, le débat se situe ici davantage sur le plan éthique qu’esthétique.
Qu’est-ce qui fait le génie de Rembrandt? Si Matton le sait (lui qui voue un culte notoire au peintre), alors on peut dire qu’il garde bien le secret! Hormis cette confidence sibylline d’un élève de Rembrandt qui avoue que son maître "a choisi de voir la pesanteur des choses plutôt que leur légèreté", nous voilà bien peu avancés. S’ajoute à cela une mise en scène d’un académisme rigoureux où, trop souvent, les personnages arborent de jolis costumes et récitent d’un air affecté leurs répliques porteuses de thèses.
À l’époque des Vélasquez, des Vermeer et des de La Tour, on reste sur l’impression que Rembrandt, un des génies artistiques de tous les temps, a eu plus de démêlés avec ses histoires de coeur, qu’il ne s’est posé de questions sur la peinture. Les images sont, il faut l’avouer, belles et léchées; mais cela n’excuse en rien le manque de profondeur. Pour amateurs d’anecdotes conjugales.
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