La Répétition/Pascale Bussières : La femme d'à côté
Cinéma

La Répétition/Pascale Bussières : La femme d’à côté

Pascale Bussières est aussi lumineuse et souriante que son personnage de Louise est sournois et sous pression. "Il doit y avoir quelque chose dans mon corps et dans mon visage", lâche-t-elle avec humour. De Beaudin (Souvenirs intimes) à Binamé (La Beauté de Pandore), Bussières sait incarner les femmes qui ont le "pathos" qui travaille. À ce sujet, le personnage de Louise est verni.

Pascale Bussières

est aussi lumineuse et souriante que son personnage de Louise est sournois et sous pression. "Il doit y avoir quelque chose dans mon corps et dans mon visage", lâche-t-elle avec humour. De Beaudin (Souvenirs intimes) à Binamé (La Beauté de Pandore), Bussières sait incarner les femmes qui ont le "pathos" qui travaille. À ce sujet, le personnage de Louise est verni. Louise est prothésiste dentaire, vivant dans le Sud de la France avec Sami Bouajila. Lors d’une soirée au théâtre, elle retrouve son amie d’enfance, Nathalie (Emmanuelle Béart). Alors qu’elles rêvaient toutes deux de monter sur les planches, une dispute post-ado les a séparées. Ce sera un drame pour Louise. Nathalie devient actrice, et Louise ronge son frein. Les retrouvailles vont passer de l’amitié à l’amour, de la passion au drame.

Alors que Catherine Corsini avait fait dans la chronique sociale féminine et drolatique avec La Nouvelle Ève, avec La Répétition, elle a testé le thriller psychologique un rien malsain porté par deux bonnes actrices: le film s’est retrouvé en compétition officielle au Festival de Cannes. "Le film n’a pas été tourné, mais monté comme un thriller, ce qui donne cet aspect un peu imposant; l’impression parfois de manquer d’air", précise Pascale Bussières. Essai bergmanien peu concluant, car le flou de départ ne se dissipe pas.

Le flou se situe dans l’intention. Louise et Nathalie sont-elles amoureuses? Qui est la victime? Qui est la jalouse? Parle-t-on d’amour à mort ou de frustration obsessionnelle? Qui a besoin de l’autre? Il est évident que la mise en lumière de sentiments aussi forts, passion et jalousie, ne peut être contrastée de façon simpliste; mais Corsini joue vraiment à la balançoire entre ses deux héroïnes. "Un réalisateur a de la pudeur à dire des choses; elles surgissent en cours de route. Et puis, cette relation se situe dans la nuance, dans le non-dit et dans les vieilles histoires non enfouies. J’ai souvent pris l’allégorie de l’araignée en pensant au personnage de Louise: elle entre dans l’autre. C’est "je t’assassine et je t’aime". On incarne déjà dit que l’apologie de l’amour, c’était de devenir un: il y en a un qui bouffe l’autre!". Reste aussi que la réalisatrice Catherine Corsini a toujours voulu être une actrice, et que, personnifiée en Louise, l’envie de tuer celle qui la dépasse artistiquement n’est pas une surprise scénaristique. Ça ou le psy…

Tournage franco-français difficile pour l’actrice québécoise, alors enceinte, et devant jouer très rapidement les caméléons pour saisir au quart de tour les subtilités culturelles. "On reste l’outsider, même si, culturellement, on s’inscrit très bien. Intérieurement, tu restes un étranger, tu n’as pas un rythme naturel. Mais dans ce cas-là, ça tombe plutôt bien: Louise doit être jouée avec un petit délai, elle est un personnage décalé. C’est quelqu’un de maladroit, de disgracieux. J’aime bien d’ailleurs ce côté volontaire d’aller là où ça fait mal", explique l’actrice. Il fallait aussi pas mal d’assurance pour supporter l’énergie "un peu tortionnaire" de la réalisatrice. "À cause de la nature du film, Catherine cherchait à déstabiliser les acteurs, mais elle sait les diriger, ajoute l’actrice, visiblement assez à l’aise dans ses baskets pour faire la part entre la folie d’un tournage et la réalité des rapports. Avec quelques scènes-clés particulièrement houleuses, Pascale Bussières dit qu’elle avait cependant hâte d’en sortir.

Rien à dire sur le duo d’actrices. Ces dames fonctionnent en osmose, tour à tour fortes et fragiles. Alors que Louise s’enracine dans sa frustration, Nathalie va éclore de ce drame. Comme si, en s’asséchant, l’une donnait à l’autre la sève pour qu’elle puisse devenir réellement une grande actrice. Et dans les derniers plans, Béart n’apparaît plus comme une poupée fragile. Elle marche solitaire avec le regard de quelqu’un qui a souffert. À voir, pour elles.

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