La Danse du guerrier : Pas à pas
La guerre. Le sujet est sur toutes les lèvres. Il les déforme souvent, dans un rictus. Marie Brodeur propose de le voir sous un autre angle, de le soulever de terre, de le transcender, de le sublimer, de l’étourdir. Bref, par la danse, de faire sortir le méchant.
La guerre. Le sujet est sur toutes les lèvres. Il les déforme souvent, dans un rictus. Marie Brodeur propose de le voir sous un autre angle, de le soulever de terre, de le transcender, de le sublimer, de l’étourdir. Bref, par la danse, de faire sortir le méchant. Ex-danseuse, le mouvement est resté source de création pour la cinéaste qu’est devenue Brodeur (La Danse en Asie, Brute, Héro). Avec La Danse du guerrier, une recherche sur les danses guerrières à travers le monde, c’est aussi un autre éclairage sur l’actualité. Un peu zen, certes, mais pas inutile. Trois ans de travail, un parcours de combattants pour une équipe de cinéma et une encyclopédie pour les Zorba de ce monde. C’est poétique et sérieux, c’est l’ONF.
Pas de fil d’Ariane trop pesant, que la voix douce de Wajdi Mouawad qui vient préciser les informations et les peintures d’un boxeur-peintre de la rue, Sid’Ali, qui, par ses énormes fresques, passe de la Grèce antique au hip-hop. Sans faire la nomenclature de toutes les danses évoquées dans ce documentaire, on peut suivre le chemin de Brodeur, plutôt impressionniste, pour recomposer le patchwork. On se rappelle que les danses guerrières existent sur tous les continents, de tous les temps, mais on s’aperçoit que les intentions divergent. À Bali, on privilégie la compassion du guerrier pour l’acte commis; en Afrique, on se donne du courage (celui d’un animal pour aller au combat); chez les Maoris, on veut effrayer avant d’attaquer; chez les Écossais, seul, les bras en l’air (comme les cornes du cerf, symbole de l’Écosse), on fête la victoire en criant et en faisant voler la jupette sur les épées en croix, la sword dance.
Caméra souple, effets spéciaux et ralentis appropriés dévoilent ce qui est résolument difficile à capter. La passion de la maîtrise dans une parade militaire, les envolées de la capoeira, le geste stylisé du kung-fu: derrière le mouvement, il y a l’intention, il y a une énergie. La danse canalise, souvent avec ferveur (véritable transe dans le vaudou ou mysticisme des danses de l’Inde). La plus étonnante, jamais filmée auparavant, est cette moreska, danse séculaire de Croatie, qui illustre de façon théâtrale et naïve la suprématie des chrétiens sur les musulmans. Un affrontement haut en couleur, sur des flonflons très rétro. On en rirait presque. Mais Brodeur finit par un Mohawk, fier, impressionnant et un rien tendu. Et par une phrase à moitié rassurante: pendant qu’on danse, on ne fait pas la guerre.
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