Serendipity : Indigestion
La recherche de l’âme soeur est un genre cinématographique à part entière. Ça fait partie de l’envoûtement de nous faire croire que malgré le temps, l’espace et les soucis sur la route, les amoureux vont se retrouver, dans une scène déchirante d’émotion. Si la magie fonctionne, on embarque dans l’invraisemblance des destins et des hasards les yeux fermés.
La recherche de l’âme soeur est un genre cinématographique à part entière. Ça fait partie de l’envoûtement de nous faire croire que malgré le temps, l’espace et les soucis sur la route, les amoureux vont se retrouver, dans une scène déchirante d’émotion. Si la magie fonctionne, on embarque dans l’invraisemblance des destins et des hasards les yeux fermés. Voir Amélie Poulain et quelques milliards d’autres bobines pour tomber dans le panneau. Mais, justement, dans la guimauve, on n’est pas des bleus. On a développé un sixième sens pour s’y retrouver dans les détours rocambolesques et pour renifler la mauvaise chimie amoureuse. Faudrait quand même pas nous prendre pour des demeurés du sentiment et des atrophiés de l’imaginaire… Notre accoutumance à la romance quémande donc un peu plus de respect que cette production en chaîne de comédies romantiques. Après Sleepless in Seattle, You’ve Got Mail, Only You, While You Were Sleeping, Return to Me, One Fine Day, et autres America’s Sweetheart, on peut casser le moule avec Serendipity, un film tellement artificiel qu’il semble avoir été uniquement conçu par ordinateur.
Le logiciel s’appelle Peter Chelsom (il s’est commis dans The Mighty et a écopé de Town and Country, cette boursouflure innommable). Il a mis en scène des bouts d’idées repiquées ailleurs pour construire sa propre mélasse. On a donc une fille superbe, toujours bien maquillée (Kate Beckinsale, un peu plus piquante que dans Pearl Harbor, mais ce n’est pas difficile), un héros adorable, rêveur et passionné (John Cusack, qui joue presque mal); une idée de départ (ils se rencontrent à New York un soir de magasinage; ils craquent l’un pour l’autre mais compliquent les choses en mettant leur destin dans les mains du hasard: elle inscrit son nom et son numéro de téléphone sur la première page de L’Amour au temps du choléra de García Márquez, livre que Cusack ne retrouvera que 10 ans après cette rencontre); et ils prennent les trois quarts du film à se courir après et à se rater. Ils ont aussi chacun des amoureux sympathiques mais pas trop (Bridget Moynahan et John Corbett); et des copains fidèles comme des épagneuls, qui font tapisserie à l’arrière-plan (Molly Shannon et Jeremy Piven). Il y a bien sûr New York sous la neige, avec la patinoire de nuit obligatoire. Le capital de sympathie est accru pour Manhattan, que l’on voit indemne dès les premiers plans, mais cela ne suffit pas à faire oublier l’insignifiance de cette romance trop bavarde, trop racoleuse et trop mal construite, qui a les saveurs de votre énième roman Harlequin.
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