Cinemania : Français en vue!
Dans la quinzaine de films proposés par la septième édition de Cinemania, le festival de films en français sous-titrés en anglais, on découvre une nouvelle cargaison de films français, disséminés au milieu de quelques productions déjà connues: Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain, Un crime au paradis, Mariages, La ville est tranquille, La vérité si je mens 2, ainsi que Diva et 37o2, le matin. Hommage donc à Jean-Jacques Beineix qui vient présenter son dernier long métrage, Mortel Transfert, film d’ouverture de ce festival.
Dans la quinzaine de films proposés par la septième édition de Cinemania, le festival de films en français sous-titrés en anglais, on découvre une nouvelle cargaison de films français, disséminés au milieu de quelques productions déjà connues: Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain, Un crime au paradis, Mariages, La ville est tranquille, La vérité si je mens 2, ainsi que Diva et 37o2, le matin. Hommage donc à Jean-Jacques Beineix qui vient présenter son dernier long métrage, Mortel Transfert, film d’ouverture de ce festival.
"J’ai voulu faire une comédie noire sur la situation d’un psy qui fait affaire avec une patiente perverse, qui doit ensuite la cacher sous son divan et, en même temps, qui essaie de comprendre les motifs de sa névrose. Il s’agit d’une enquête à la fois policière et psychanalytique", explique d’une voix cordiale celui qui n’a pas fait de fictions (mais des documentaires) depuis huit ans, depuis IP5: l’île aux pachydermes. Or, le style Beineix est toujours là: une bonne prémisse, la structure d’une histoire plus poétique que linéaire, des personnages secondaires peu ordinaires, et un soin superbe apporté aux images. Et, en retrouvailles, un Jean-Hugues Anglade en forme, dans la peau de ce psy qui n’aimerait rien de mieux qu’une vie amoureuse tranquille et des névroses sympathiques. Hélène de Fougerolles incarne Olga, qui sort tout droit d’une photo d’Helmut Newton, plus perverse qu’une caricature, et irritante, tant elle semble au-delà du réel. Elle est un concentré de sadomasochisme. "J’ai voulu mettre en scène une tendance, et le SM est à la mode depuis le retour de l’ordre moral, après les années 70. Et je tourne en dérision cette tendance", explique le réalisateur de Diva. Le film commence et se termine sur un sexe de femme; on croise une prof de maths perverse (drôle Catherine Mouchet), un éjaculateur précoce, un gothique chevauchant sa poupée gonflable, et Anglade qui perd les pédales et qui bande sur un édredon… On baigne dans le fantasme. Comme La Lune dans le caniveau, Mortel Transfert n’appartient pas à un genre précis. À la fois polar, thriller, comédie légère avec résonances hitchcockiennes, le film nous tire de tous bords. Il commence très bien puis s’enlise. Comme il arrive parfois, les parties s’avèrent alors plus intéressantes que la somme, rapidement ennuyeuse. On retient les grimaces d’Anglade; Miki Manojlovic en clochard superbe qui se réchauffe en brûlant des billets de banque, et Denis Podalydès, en flic malpoli. La lumière découpée dans ce superbe cabinet et les bleus fétiches de Beineix ont malheureusement du mal à combattre la lassitude engendrée par une comédie intellectuelle sur la psychanalyse qui aurait aimé être débridée…
Stand By
À l’aéroport d’Orly, une femme (Dominique Blanc) est plaquée par son mari (Patrick Catalifo), juste avant de s’envoler pour Buenos Aires, où ils devaient refaire leur vie. Sous le choc, elle craque, et reste dans l’aéroport, s’accrochant à un espoir de retour. Puis, peu à peu, l’épouse modèle occupe les lieux, et s’installe dans une nouvelle vie, celle de prostituée pour voyageurs en transit. Des salles de bain aux restaurants et boutiques, en passant par les chambres d’hôtel, elle trouve tout ce qu’il faut pour vivre, y compris des amis, comme ce gentil barman (Roschdy Zem), qui rêve de partir avec elle au Mexique. Son mari reviendra-t-il? Partira-t-elle avec le barman? Jusqu’à quand pourra-t-elle mener cette vie en suspens?
À partir de trois fois rien, Roch Stephanik a écrit et réalisé un film magnifique. Un trois fois rien qui s’appuie sur un scénario rigoureux, et une comédienne magistrale. Plausible de bout en bout, cette improbable histoire est menée de main de maître, et Dominique Blanc incarne, avec nuance et force, cette femme qui se découvre en pratiquant le plus vieux métier du monde, et se libère en vivant dans un monde clos. Un vrai coup de coeur. (É. Fourlanty)
Trois huit
Nouveau venu dans une usine de bouteilles, où il travaille de nuit, Pierre (Gérald Laroche) est harcelé par un fort en gueule (Marc Barbé) qui, tout en prétendant être son ami, ne manque pas une occasion de l’humilier. D’abord anodines, les attaques deviennent plus violentes, et le rapport entre les deux hommes, plus ambigu, alors que la femme de Pierre (Luce Mouchel) s’absente pour un mois, et que son fils (Bastien Le Roy) entre dans l’adolescence.
Après Les Deux Fragonnard, film historique, et L’Année Juliette, comédie légère avec Luchini, Philippe Le Guay change de registre, et aborde des thèmes plus graves comme l’humiliation, la paternité, et la part d’ombre dans les rapports humains. Évitant les écueils du film psychologique sur les liens entre bourreau et victime, ou ceux d’une chronique platement sociale, le cinéaste fait un portrait saisissant, et jamais complaisant, de la violence ordinaire et de la barbarie quotidienne. Interprété par d’excellents comédiens, Trois huit est de ces films qui, l’air de rien, déstabilisent. Pour notre plus grand plaisir. (É. Fourlanty)
Les Marchands de sable
Tout juste sortie de prison, Marie (Marina Golovine) se réfugie chez son frère (Mathieu Demy), petit revendeur de drogue qui, afin de partir avec sa soeur au soleil, tente un gros coup en escroquant ses fournisseurs. Tout ça finira très mal…
Que s’est-il passé? Après trois comédies aigres-douces plutôt réussies et originales (surtout Cible émouvante), Pierre Salvadori s’essaie au polar, et signe un film sans relief, ressemblant à des dizaines d’autres "petits policiers français" qui, aujourd’hui, sont généralement tournés pour la télévision. Pour une scène intéressante – une poursuite dans les rues de Paris, aux accents de chemin de croix – , on a droit à une intrigue prévisible à chaque étape, à des personnages sans consistance, et à une mise en scène télévisuelle. Rendez-nous notre Salvadori! (É. Fourlanty)
Origine contrôlée
Dans ce road-movie sympathique, Patrick (Patrick Ligardes), un Français déguisé en femme, après avoir quitté une fête costumée, se fait voler ses papiers par un immigrant illégal algérien travesti, lors d’une descente. Arrêté avec les papiers de ce dernier, Patrick est menacé d’expulsion de France. Avec la complicité de ses partenaires de cellule, la belle Sonia (Ronit Elkabetz) et le fantasque Youssef (Atmen Kelif), Patrick réussit à s’échapper. S’ensuivent une course folle dans la France rurale et de nombreux rebondissements cocasses. Bien rythmé et bien joué, Origine contrôlée de Zakia et Ahmed Bouchaala (Krim) surprend d’abord par le ton qu’ont choisi les réalisateurs pour aborder le phénomène de l’immigration. Par ailleurs, on n’hésite pas à écorcher le système judiciaire, et les clichés sur l’identité en prennent plein la gueule. Un film irrésistible et étonnamment drôle sur la triste réalité des réfugiés. (M. Dumais)
La Maîtresse en maillot de bain
En première nord-américaine, La Maîtresse en maillot de bain de Lyèce Boukhitine (La Vieille Barrière) est un portrait sans complaisance de la vie de banlieue mettant en scène trois amis d’enfance dans la trentaine, sans emploi, ni ambition, qui décident de commettre des vols à Lyon. Sur le chemin du retour, ils filment par hasard un règlement de comptes. Croyant avoir une mine d’or entre les mains, les trois amis tentent de faire chanter les meurtriers. Malgré son rythme inégal et ses quelques invraisemblances, cette comédie dramatique demeure plaisante grâce à l’interprétation naturelle de Franck Gourlat, Lyèce Boukhitine et Éric Savin. À noter, la participation de Zinedine Soualem, qui jouait le père dans L’Ange de goudron. (M. Dumais)
Quand on sera grand
Pour clôturer le festival en beauté, Quand on sera grand, de Renaud Cohen, prix du public au dernier Festival du film d’Angers. Dans cette charmante comédie douce-amère, Mathieu Demy campe Simon, un jeune journaliste un peu blasé qui trouvera un nouveau sens à sa vie en tentant de régler les problèmes de son entourage. De la grand-mère gaga (Louise Bénazéraf) au papa psychanalyste de Simon (Maurice Bénichou), en passant par une jolie voisine enceinte jusqu’aux dents (Judith El Zein), ce premier long métrage propose une galerie de personnages à la fois drôles et émouvants. Alter ego du réalisateur, Demy, qui a remporté le prix du meilleur acteur au Festival du film de Paris cette année, joue avec une belle subtilité ce héros altruiste et rêveur. Un regard tendre, lucide, avec une touche de fantaisie sur la crise de la trentaine et les affres de la vie moderne. (M. Dumais)
Du 1er au 11 novembre
Au Musée des beaux-arts de Montréal