Lise et André : Crise de foi
Cinéma

Lise et André : Crise de foi

Dans un monde pris en otage par une armée de Harry Potter, il est difficile d’attirer l’attention sur un film comme Lise et André. En effet, avec un titre peu invitant, aucune vedette à l’horizon et pas de thème à la mode, c’est l’anti-film-événement. Pourtant, l’ignorer équivaudrait à passer à côté d’un joli film qui, en allant à contre-courant, possède un charme peu banal.

Dans un monde pris en otage par une armée de Harry Potter, il est difficile d’attirer l’attention sur un film comme Lise et André. En effet, avec un titre peu invitant, aucune vedette à l’horizon et pas de thème à la mode, c’est l’anti-film-événement. Pourtant, l’ignorer équivaudrait à passer à côté d’un joli film qui, en allant à contre-courant, possède un charme peu banal.

Sur la trame classique du road movie, réunissant deux personnalités que tout éloigne, Lise et André met en scène une Parisienne (Isabelle Candelier) vivant de ses charmes auprès d’une clientèle fidèle, et dont le petit garçon est dans le coma depuis trois mois, à la suite d’un accident de la circulation. Devant la démission de la médecine, la jeune mère décide d’aller prier la vierge d’Abbeville, petite bourgade du Nord, où elle est née. Elle demande l’aide d’un prêtre (Michel Duchaussoy), directeur de la chorale où chantait son fils, homme désenchanté, qui refuse, affirmant ne pas croire aux miracles, puis qui cède, face aux avances plus qu’insistantes de la jeune femme. Le voyage sera déterminant pour ces deux âmes en peine…

Dans Les Cachetonneurs, premier film, bien, mais sans plus, de Denis Dercourt, on sentait déjà quelque chose d’unique, un rythme très personnel, une attention toute particulière portée à des personnages quotidiens, sans tomber dans le misérabilisme ou la tranche de vie. On retrouve ses qualités d’humaniste lucide dans Lise et André, mais sur un canevas plus resserré. La situation pourrait être mélodramatique, mais elle ne l’est pas; l’opposition entre une Marie-Madeleine repentante et un fonctionnaire de la foi, qui reprend goût à la vie, aurait pu être caricaturale, mais elle échappe aux clichés grâce, entre autres, à la qualité des interprètes. Avec sa tête à la Magali Noël, Isabelle Candelier apporte toute l’énergie nécessaire pour ne pas tomber dans le pathos; et Michel Duchaussoy, acteur "chabrolien" qu’on a un peu perdu de vue au cinéma, compose un prêtre saisissant, malgré un physique qui évoque davantage l’aristocrate viveur que l’homme d’Église…

Là où le bât blesse, c’est dans l’aspect parfois trop explicatif du scénario et des dialogues, tous deux signés par le cinéaste. Un sujet aussi délicat que la foi, religieuse ou autre, est rapidement miné par des explications de textes ou des personnages décoratifs, comme ceux du jeune automobiliste catholique, ou de la propriétaire de restaurant vietnamienne. Malgré ce léger bémol, Lise et André se distingue par un ton intemporel et une émotion sobre. Un film pour sortir des sentiers battus.

Par ailleurs, on pourra voir, en avant-programme, Killing Time, un court métrage de Tara Johns, dans lequel une femme (Claudia Ferri), par un après-midi d’été, se retrouve à la croisée des chemins, dans un parking de centre commercial. Une idée simple, bien exploitée; une atmosphère onirique à force d’hyperréalisme, des images d’Yves Bélanger qui évoquent un Paris, Texas de banlieue; une musique envoûtante de Laurent Guardo; et la présence forte de Claudia Ferri: en 14 minutes, Killing Time signale l’arrivée d’une cinéaste à suivre de près.

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