The Shipping News : Fait d'hiver
Cinéma

The Shipping News : Fait d’hiver

Parlons de la famille. Cela tourne à la monomanie chez Lasse Hallström (My Life as a Dog, What’s Eating Gilbert Grape?, The Cider House Rules et Chocolat). Par contre, son talent n’est pas toujours aussi aiguisé. Après le pénible Chocolat, tout était cependant en place pour qu’on saute de joie en voyant The Shipping News.

Parlons de la famille. Cela tourne à la monomanie chez Lasse Hallström (My Life as a Dog, What’s Eating Gilbert Grape?, The Cider House Rules et Chocolat). Par contre, son talent n’est pas toujours aussi aiguisé. Après le pénible Chocolat, tout était cependant en place pour qu’on saute de joie en voyant The Shipping News: Hallström est un bon réalisateur, sensible observateur de l’enfance; The Shipping News, d’E. Annie Proulx, a remporté le Pulitzer; et Kevin Spacey, Julianne Moore, Cate Blanchett et Judi Dench sont de belles pointures.

Mais on passe à côté du plaisir. On sent qu’il aurait pu être là cependant, dans ce récit humain sur la conquête de la confiance en soi. Quoyle (Spacey) est un type mal aimé par ses parents, diminué par des boulots nuls, et totalement bafoué par une femme, Petal (Blanchett, étonnante), qui lui laisse une petite fille avant de s’enfuir avec le premier venu et de se tuer en voiture. Quoyle va partir, sur l’avis de sa tante (Dench), vivre sur l’île de ses ancêtres, Terre-Neuve, où le journalisme et une femme l’aideront à se rebâtir. On aime les héros minuscules qui, souffle après souffle, reprennent possession de leur vie. On aime les histoires cachées des gens ordinaires, les chroniques des coins oubliés, les moments sans action qui éclatent d’émotion. Dans ces cas-là, on aime par-dessus tout l’artiste sensible qui a su dessiner le croquis.

On pense au Sean Penn de The Indian Runner, on pense à Kenneth Lonergan, réalisateur de You Can Count on Me. On pense aussi à Hallström, à celui d’avant, à celui qui ne se serait pas endormi sur ses lauriers, et qui aurait dû voir que son film commençait bien mais tournait à vide, qui aurait pu voir que Julianne Moore valait mieux qu’un rôle de plante verte, et surtout que Kevin Spacey souffrait de boursouflure talentueuse.

L’oeil vitreux, la moumoute éventée, la posture gauche et la voix trop douce ne lui vont pas. Cela lui va si peu, en fait, qu’il n’y arrive pas. L’acteur, pourtant habitué aux hommes bafoués, est trop aiguisé pour jouer aisément une victime molle. Cet air appuyé de chien battu sera peut-être supportable pour un jury aux Oscars, mais il ne cadre pas dans un port de pêche, où tous cachent leurs émotions derrière un visage de pierre. Rudes, ces Newfies… Reste un paysage splendide, plus escarpé que dans Les Hauts de Hurlevent. Détail: la flûte celtique qu’on entend de façon systématique dès qu’on voit une mer du Nord n’était pas non plus nécessaire.

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