Mon cher Fidel : Liaisons dangereuses
Cinéma

Mon cher Fidel : Liaisons dangereuses

Quand la réalité dépasse la fiction la plus improbable, et qu’on veut en témoigner, autant choisir le documentaire. C’est ce qu’a fait Wilfried Huismann, afin de retracer la vie ahurissante de Marita Lorenz, maîtresse de Castro en 1959, au lendemain de la révolution cubaine, et de Marcos Pérez Jiménez, dictateur vénézuélien, en 1962, de qui elle aura une fille; puis agente de la CIA, du FBI, et collaboratrice de la mafia.

Quand la réalité dépasse la fiction la plus improbable, et qu’on veut en témoigner, autant choisir le documentaire. C’est ce qu’a fait Wilfried Huismann, afin de retracer la vie ahurissante de Marita Lorenz, maîtresse de Castro en 1959, au lendemain de la révolution cubaine, et de Marcos Pérez Jiménez, dictateur vénézuélien, en 1962, de qui elle aura une fille; puis agente de la CIA, du FBI, et collaboratrice de la mafia. Un parcours étonnant, pour un film qui se regarde comme un thriller d’espionnage.

Fille d’un capitaine de la marine allemande et d’une actrice américaine, Marita Lorenz est internée au camp de concentration de Bergen-Belsen à cinq ans, et violée par le père d’une amie deux ans plus tard. Deux traumatismes qui lui donnent une rage au ventre, une énergie du désespoir, et un sens de la survie toujours intacts, 60 ans plus tard, dans son petit appartement new-yorkais, alors qu’elle repasse les grandes lignes de sa vie mouvementée. Avortement forcé de l’enfant de Castro et tentative d’assassinat, également avortée, du dictateur cubain; lavage de cerveau et entraînement militaire; espionnage pour la CIA et mariage avec un agent du FBI; liens obscurs avec l’assassinat de Kennedy et relations troubles avec des organisations mafieuses: la suite des événements est tout aussi mouvementée.

Films d’archives, retour sur les "lieux des crimes" (à Cuba, en Floride et à Washington), entrevues avec tous les acteurs de cette épopée (sauf Fidel, bien sûr), et reconstitutions des épisodes les plus marquants: Mon cher Fidel intègre habilement chaque élément de cette saga. Ce qui frappe le plus chez cette femme qui, après 1 h 30 de confession, garde tout son mystère, c’est l’absence apparente de regard sur sa propre vie. Pur produit de la guerre froide, cette Mata Hari à la retraite n’aura été fidèle qu’à une seule personne: elle-même. Il faut la voir retourner à La Havane, pour tenter de revoir son premier amour, et le traiter de lâche devant son ennemi juré; il faut l’entendre parler de Castro et de Jiménez: "Les dictateurs sont tous des femmelettes!" Pour cette force de la nature, les bouleversements du 20e siècle n’auront été que la toile de fond d’une vie menée tambour battant. Sans tomber dans l’admiration béate, le film de Wilfried Huismann lui rend un hommage lucide. Stupéfiant.

Voir calendrier
Cinéma exclusivités