RIN : La part du rêve
Cinéma

RIN : La part du rêve

L’Histoire peut être la chose la plus vivante qui soit. Puisque, plus que dans l’exactitude, tout est dans la manière d’aborder le passé. Il faut savoir le raconter pour le faire revivre. Pierre Bourgault a encore ce talent-là. Ça tombe bien, puisque Jean-Claude Labrecque a réalisé un documentaire sur le RIN, dont Bourgault fut quelque temps le président.

L’Histoire peut être la chose la plus vivante qui soit. Puisque, plus que dans l’exactitude, tout est dans la manière d’aborder le passé. Il faut savoir le raconter pour le faire revivre. Pierre Bourgault a encore ce talent-là. Ça tombe bien, puisque Jean-Claude Labrecque a réalisé un documentaire sur le RIN, dont Bourgault fut quelque temps le président. Le Rassemblement pour l’indépendance nationale, premier mouvement qui s’affichait pour l’indépendance et parti politique bref, a généré une grande effervescence.

Sur le plan formel, RIN est un documentaire très passe-partout, très "télégénique": entrevues sur fond noir de type Pete Rose, fondus au noir, images d’archives, intertitres chronologiques. On a quand même évité la voix off impersonnelle qui comble les trous. Par contre, si l’on ne s’endort pas devant ce classique retour en arrière, c’est bien à cause du sujet et de la manière dont les intervenants l’abordent. Entre 1960 et 1968, les souvenirs rocambolesques reviennent, par les voix de Pierre Bourgault, Andrée Ferretti et André d’Allemagne, à qui le film est dédié. C’est l’émotion pour Ferretti, la passion pour Bourgault et la théorie intellectuelle pour d’Allemagne; un triptyque qui fonctionne assez bien.

En plus de retracer les années d’existence houleuse de ce mouvement et d’éclairer de façon assez précise l’évolution historique du Québec récent, ce film en dit aussi long sur le pouvoir, les jeux de diplomatie politique et les rêves qui se concrétisent simultanément (RIN, MSA, FLQ, Parti québécois) puis disparaissent avec le temps. Le tout ponctué par les phrases assassines de Bourgault ("Maudit épais! Aucun sens historique!"), on voit un René Lévesque qui veut sortir de l’ombre et qui aimerait que le RIN joue le rôle de repoussoir extrémiste; un Jean Lesage balourd, un Daniel Johnson retors et un de Gaulle qui savait, comme personne, tourner l’air du temps en moments historiques. Avec un documentaire comme celui-ci, on tombe vite dans la nostalgie de ces vertes et folles années aujourd’hui disparues… Andrée Ferretti lâche sa larme et Bourgault termine avec une belle phrase sur la fidélité à ses rêves de jeunesse. Bien sûr que c’est agaçant pour ceux et celles qui venaient tout juste de naître et qui ont raté ce coche-là; qui voient bien que l’exaltation n’existe plus, que le vent vire à droite et que tout le monde s’en fout! Mais outre cette nostalgie doublée de notre mélancolie, avec la raideur formelle par-dessus tout: le film vaut le détour. Pour apprendre, encore et encore.

Voir calendrier
Cinéma exclusivités