One Hour Photo : Impression floue
On nous a tant cassé les oreilles avec le côté sombre de Robin Williams qu’il serait tentant de passer sous silence son étonnante performance! Mais l’intérêt principal de One Hour Photo, premier long métrage du réalisateur-scénariste Mark Romanek, résidant justement en ce point, force est donc de s’y soumettre.
On nous a tant cassé les oreilles avec le côté sombre de Robin Williams qu’il serait tentant de passer sous silence son étonnante performance! Mais l’intérêt principal de One Hour Photo, premier long métrage du réalisateur-scénariste Mark Romanek, résidant justement en ce point, force est donc de s’y soumettre.
Sy Parrish travaille dans un laboratoire photo d’un centre commercial. Célibataire solitaire, l’homme vit sa vie par procuration par le biais des photos de la famille Yorkin. Cette petite famille parfaite l’obsède tant que la réalité et le fantasme ne font souvent plus qu’un. Grâce au jeu de Williams, Sy paraît d’abord touchant, tout en laissant malgré tout une impression de malaise. Ses tentatives pour s’immiscer dans la vie des autres s’avèrent maladroites et de plus en plus pathétiques. Alors qu’il éveillait l’angoisse dans Insomnia, Williams suscite d’abord la compassion avec son visage de clown triste; et cela sans forcer la note – ce qui nous change agréablement de ses excès passés. Et bien que Sy envahisse de façon inquiétante la vie des Yorkin, la sympathie se porte davantage vers ce pauvre mésadapté socio-affectif que vers cette famille clichée. One Hour Photo débute de façon assez classique. Y a-t-il eu meurtre ou non? Si oui, comment et pourquoi? Long flash-back et voix off pour relater comment cet homme apparemment inoffensif a déjanté. Par petites touches, la personnalité complexe du bonhomme se dévoile.
Artisan renommé du vidéo-clip (Madonna, Nine Inch Nails, etc.), Mark Romanek a misé sur l’esthétique plus que sur la vraisemblance du récit. Très blond, toujours vêtu de tons neutres, Sy évolue dans un milieu incolore et impersonnel auquel il se fond. Lorsqu’il pénètre dans l’univers aux couleurs vibrantes de la famille Yorkin, il jure tristement. La photographie de Jeff Cronenweth (Fight Club) donne à One Hour Photo un fini glacé qui sied parfaitement au monde aseptisé de l’un ainsi qu’au concentré de bonheur des autres. Avec leur belle maison, leur voiture luxueuse et leurs vêtements griffés dans les chaudes teintes de terre, ces derniers semblent tout droit sortis d’un catalogue de luxe. Pourtant le portrait n’est pas aussi parfait qu’il en a l’air, comme le découvre avec effroi le bienveillant Sy. Papa Will (Michael Vartan) néglige femme et enfant à cause du boulot; Maman Nina (Connie Nielsen) tue l’ennui en faisant du shopping; et, se sentant délaissé, Fiston Jake (Dylan Smith) est le seul à deviner la triste existence de Sy. Aux prises avec des personnages si peu fouillés, les acteurs posent plus qu’ils ne jouent.
La musique grinçante de Reinhold Heil et Johnny Klimek (qui ont signé les trames sonores des films de Tom Tykwer) confère une note insolite à cet univers trop blanc. Puis, à l’instar de Sy, le rythme change du tout au tout dans le dernier tiers. Tant et si bien que l’on se croirait dans Fatal Attraction… En dépit d’une réalisation soignée et du jeu senti de Williams, One Hour Photo s’avère au bout du compte un thriller assez convenu.
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