Gambling, Gods and LSD / Peter Mettler : Les illuminations
Cinéma

Gambling, Gods and LSD / Peter Mettler : Les illuminations

Grand Prix du Festival international du cinéma documentaire Visions du Réel de Nyon, et Prix du documentaire ONF au dernier FCMM, Gambling, Gods and LSD ne serait pas un documentaire, au dire même de son réalisateur Peter Mettler. Refusant les catégories, Mettler propose un concept inspiré des couleurs du spectre solaire. Voici le "film blanc"…

Grand Prix du Festival international du cinéma documentaire Visions du Réel de Nyon, et Prix du documentaire ONF au dernier FCMM, Gambling, Gods and LSD ne serait pas un documentaire, au dire même de son réalisateur Peter Mettler. Refusant les catégories, Mettler propose un concept inspiré des couleurs du spectre solaire. Voici le "film blanc"…

Tourné à Toronto, où le réalisateur a grandi, à Las Vegas, en Suisse (son pays d’origine), et en Inde, Gambling, Gods and LSD traite de quatre thèmes: le déni de la mort, la transcendance, l’illusion de la sécurité et notre relation à la nature. D’une durée de trois heures (le matériel original en totalise 55!), ce "film blanc" comporte des images troublantes, telle cette cérémonie évangéliste où des croyants s’effondrent; ou encore cette jolie jeune femme installée sur une "sex machine". Était-ce difficile de ne pas juger ou de ne pas intervenir? "Pas vraiment, avance le réalisateur. En apparence, ces scènes sont dérangeantes, car différentes de notre réalité. Mais d’une certaine manière, on se reconnaît un peu à travers ces gens, on fait tous des choses que les autres n’acceptent pas. Durant le tournage, j’ai parfaitement compris que chaque personne a sa propre façon de trouver une signification à sa vie, de fuir la réalité ou de trouver la paix. Je respecte tout cela aussi longtemps que ça ne devient pas violent ou dangereux pour autrui. J’ai essayé de garder une attitude sans préjugés, pour laisser ces gens être ce qu’ils sont. C’est dans cet esprit que j’ai voulu faire le film."

Dès les toutes premières images de cette grande (et longue) odyssée spirituelle, force est de constater que l’image et le son se fondent parfaitement ensemble. En plus des influences musicales, on devine celles de la peinture alors que les paysages deviennent des tableaux abstraits. "J’ai commencé à faire des films à 16 ans, explique Mettler. Quand j’étais très jeune, j’ai étudié la musique, le piano. J’ai fait beaucoup de photo. Je crois que mes films (Les Plaques tectoniques, Picture of Light) sont des compositions audiovisuelles, et que leurs influences tendent davantage vers d’autres formes d’art que le cinéma. Car en fait, je ne suis pas si intéressé par les intrigues, ni par le fait de raconter des histoires. Je suis beaucoup plus intéressé à créer des expériences sensuelles, à observer la perception elle-même, ou à susciter des émotions."

Par ses thèmes et son approche, le film de Mettler n’est pas sans rappeler le Koyaanisqatsi, de Godfrey Reggio, documentaire porté par l’envoûtante trame sonore de Philip Glass sur le chaos de la société moderne face au calme de la nature. Toutefois, chez Mettler, c’est le principe de la lenteur qui prime. Pas de montage frénétique ou de mouvements accélérés. Le réalisateur avoue que sa propre quête spirituelle se veut également une aventure subjective pour le spectateur, espace où l’information n’est pas dominante. Dévoiler les détails sur les gens et les lieux lui semblait superflu, il souhaitait que le spectateur vive une expérience spirituelle, philosophique, intellectuelle et sensuelle à partir de chaque lieu visité!

En voyant des images presque idylliques de l’Inde, on se demande si le réalisateur n’a pas voulu nous signifier que le bonheur était ailleurs ou que nos valeurs n’avaient plus de sens. "Je ne voulais pas idéaliser l’Inde, se défend Mettler, car je ne crois pas que la réponse s’y trouve. Dans un sens, le petit garçon courant sur la rive se lance à notre poursuite. C’est vers l’Occident qu’il court, vers le matérialisme. Les Indiens nous idéalisent autant que nous les idéalisons. Je ne vois pas mon film comme un portrait si négatif de notre société – bien que je pourrais le voir également ainsi -; je le vois davantage comme un regard sur notre condition actuelle. Et j’y vois aussi de l’espoir et de l’optimisme."

Grâce à son caractère très méditatif, Gambling, Gods and LSD soulève plusieurs interrogations, à la grande surprise de son auteur, cependant très heureux de constater toutes les discussions que son film provoque. On prétend même que ce film changera notre perception du monde, qu’en est-il du principal intéressé? "Oui, cela a changé ma façon de voir le monde, pas comme une épiphanie, mais ça m’a aidé à être plus sensible et de comprendre les liens qui unissent les gens issus de cultures différentes. Mais je ne dirais quand même pas que j’ai atteint la transcendance…"

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