Adaptation : Culture en pot
Cinéma

Adaptation : Culture en pot

Au sortir d’un film gigogne, rien n’est clair. Faut remettre ses idées en place, un peu paumés que nous sommes dans les circonvolutions scénaristiques. On a vu quoi, là? Un paquet de pensées plaisamment longues à digérer ou des coquilles vides? En fait, il y a souvent osmose; et la complexité du labyrinthe devient le sens même. À la manière des films couches d’oignon de type Being John Malkovich, Mémento, Storytelling, Simone ou Full Frontal, Adaptation est, comme le dit Nicolas Cage de son personnage, un serpent qui se mange la queue… Ça tourne plutôt à vide, c’est faussement compliqué, très à la mode et plutôt agréable à regarder.

Au sortir d’un film gigogne, rien n’est clair. Faut remettre ses idées en place, un peu paumés que nous sommes dans les circonvolutions scénaristiques. On a vu quoi, là? Un paquet de pensées plaisamment longues à digérer ou des coquilles vides? En fait, il y a souvent osmose; et la complexité du labyrinthe devient le sens même. À la manière des films couches d’oignon de type Being John Malkovich, Mémento, Storytelling, Simone ou Full Frontal, Adaptation est, comme le dit Nicolas Cage de son personnage, un serpent qui se mange la queue… Ça tourne plutôt à vide, c’est faussement compliqué, très à la mode et plutôt agréable à regarder.

Idée de dingues bien développée: Charlie Kaufman (joué par Nicolas Cage, enfin bien), scénariste surdoué mais fortement secoué de Being John Malkovich (et le triste Human Nature), doit adapter le vrai best-seller The Orchid Thief, de la vraie romancière-journaliste Susan Orlean. Il n’y arrive pas, et Spike Jonze filme ce non-fait: il réalise un film autour d’un film à faire sur un scénario qui part d’un bouquin basé sur une histoire vraie. C’est ça, ou regarder dans les boucles d’oreilles de La Vache qui rit. Et tout part de Kaufman, insupportable loser. Mais on échappe au bain de Narcisse tant les personnages et le rocambolesque sauvent la mise. On salue l’apparition d’un frère jumeau, scénariste lui aussi mais vendu à Hollywood (le côté yang du personnage), la double vie de cette romancière (toujours si juste Meryl Streep), et la construction du personnage fou d’orchidées, John Laroche (Chris Cooper). On a droit à des divagations darwiniennes, à des flash-back toutes les 10 minutes (dont un qui remonte à Hollywood au moment du big-bang) et à une finale qui rejoint le scénario thriller du jumeau. On sourit devant tant d’inventivité, de surprises, de zéro temps mort, et on rit des phrases assassines. Pas de doute, le scénario est brillant. C’est une comédie fine, comme on le dit d’une épicerie. Avec le snobisme ironique du moment.

On nous parle des affres de l’adaptation (sociale, amoureuse, organique, économique) et ce, depuis Hollywood, éternelle Mecque des faux-semblants qui fait de la bouillie de tout art. Alors, on compatit d’avance avec le héros, si dévasté d’être un îlot de culture et de sensibilité (pauvre nouille qui veut faire un film sur les fleurs) dans cette masse mercantile abrutie, et avec cette femme qui cherche la Vérité et le Bonheur. On aime aussi la passion de ce Laroche, véritable diamant sur lequel tous se jettent. Et on aimerait les suivre encore plus, que le tordu de l’histoire les laisse respirer. L’agaçante couche d’apprêt qu’ils ont sur le dos (ils ne sont jamais dans des situations banales, n’ont pas des comportements simples, ce sont tous des Big Lebowski en puissance) atténue la force de vie, dilue la foi en l’humain et en sa capacité de se plier à son environnement. Et essayer de finir de façon dénudée comme Wong Kar-Wai dans Happy Together ne marche pas. Ce qui fonctionne par contre, c’est ce serpent qui se mord la queue, métaphore d’une industrie cinématographique si jeune et pourtant si essoufflée, sans idées originales, à la merci des adaptations.

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