Rabbit-Proof Fence / Philip Noyce : La fuite dans le désert
Cinéma

Rabbit-Proof Fence / Philip Noyce : La fuite dans le désert

"En tournant Rabbit-Proof Fence, je n’avais pas l’impression de renouer avec mon pays, mais de le découvrir, confiait le réalisateur Philip Noyce lors de son passage au FFM. Je faisais connaissance avec des faits, des lieux, des gens dont je n’avais jamais entendu parler. En fait, j’apprenais une page volée de mon histoire." Après une douzaine d’années à tourner des thrillers à Hollywood, Noyce (The Bone Collector) a effectué un heureux retour aux sources pour dévoiler un aspect longtemps caché de l’histoire australienne, la "génération volée".

"En tournant Rabbit-Proof Fence, je n’avais pas l’impression de renouer avec mon pays, mais de le découvrir, confiait le réalisateur Philip Noyce lors de son passage au FFM. Je faisais connaissance avec des faits, des lieux, des gens dont je n’avais jamais entendu parler. En fait, j’apprenais une page volée de mon histoire." Après une douzaine d’années à tourner des thrillers à Hollywood, Noyce (The Bone Collector) a effectué un heureux retour aux sources pour dévoiler un aspect longtemps caché de l’histoire australienne, la "génération volée".

De la moitié du 19e siècle aux années 1970, les enfants aborigènes nés de père blanc étaient arrachés à leur mère afin d’être élevés dans des camps à la manière des Blancs. Comme l’explique A.O. Neville (Kenneth Branagh, très sobre), responsable de la protection des aborigènes, il fallait éviter de créer une troisième race. En se mariant avec des Blancs, les métis et les quarterons voyaient donc leur sang noir disparaître. Basé sur le livre de Doris Pilkington Garimara, Rabbit-Proof Fence relate le long périple de Molly Craig (la mère de l’auteur), une adolescente de 14 ans qui, en 1931, avec sa jeune soeur et sa cousine, longea la clôture servant à décourager les lapins des fermes agricoles sur tout le continent afin de regagner son foyer.

Tourné à hauteur d’enfant, Rabbit-Proof Fence bénéficie de la photographie soignée de Christopher Doyle (In the Mood for Love) grâce à laquelle la nature hostile mais grandiose du désert australien devient un personnage à part entière. Lorsque les trois fillettes sont enlevées sur les ordres de Neville, les femmes du village s’effondrent sur le sol en gémissant; leurs silhouettes font alors corps avec le paysage sablonneux. De même, les fillettes en fuite se confondent dans la végétation qui devient alors protectrice et nourricière.

Pour la trame sonore, Noyce s’est tourné vers Peter Gabriel: "Peter n’aimait pas le genre de films que je faisais. Mais lorsque je l’ai mis au courant de mon projet, il s’y est intéressé immédiatement. Il m’a alors demandé de lui enregistrer tous les bruits que les fillettes pourraient entendre dans le désert, car il voulait créer une musique qui vienne de la terre." Composée à partir d’échantillonnages de sons de vent, de pluie et d’espèces animales vivant dans le désert, la trame sonore de Gabriel confère à l’ensemble une atmosphère vraiment saisissante.

Aux prises avec trois jeunes actrices inexpérimentées, le réalisateur explique qu’il a réduit les dialogues: "Je ne voulais pas qu’elles récitent leur texte comme des tables de multiplication. Je leur demandais donc de ne pas l’apprendre, et leur décrivais les scènes à mesure qu’on les tournait en jouant avec leur instinct." Un résultat concluant puisque chaque fillette joue avec beaucoup de naturel, notamment la remarquable Everlyn Sampi qui incarne Molly. Avec Rabbit-Proof Fence, Philip Noyce éclaire un moment sombre de l’Histoire, et livre un vibrant hommage à un peuple bafoué: "La culture aborigène est de plus en plus présente dans différents domaines des arts; mon film ne fait que participer à la promotion de cette culture."

Voir calendrier
Cinéma exclusivités