Comment ma mère accoucha de moi durant sa ménopause : L'homme qui aimait les femmes
Cinéma

Comment ma mère accoucha de moi durant sa ménopause : L’homme qui aimait les femmes

Les hommes, les femmes, les enfants, le sexe et la difficulté de grandir: Voici une comédie dramatique actuelle au ton personnel. Assumé et décapant.

Les hommes et les femmes, le sujet est un vortex sans fin. Épuisant. Chaque camp a ses munitions, on s’envoie des pavés régulièrement, on joue à la guerre des sexes. Comme s’il fallait gagner à un jeu pareil… L’important étant de participer, Sébastien Rose a donc fait entendre sa voix. Rose est le réalisateur de Comment ma mère accoucha de moi durant sa ménopause, un premier long métrage amusant, parfois déroutant, et qui entre parfaitement dans la catégorie comédie dramatique. On n’a pas ça souvent ici. Le fond est glauque, mais on va donc en rire. Le fond, c’est un type sympa, trentenaire intelligent, bourgeois et cultivé (Paul Ahmarani), sérieusement coincé par sa mère militairement fémino (Micheline Lanctôt), une soeur en copie conforme de la mère (Sylvie Moreau), une psy qui aimerait l’aider et l’aimer (Anne-Marie Cadieux), et une blonde qu’il aimerait pour lui tout seul (Lucie Laurier). Le rire vient de l’ironie qui colore tout le film. Sébastien Rose a fait des études de philo et il mélange bien les préoccupations existentielles à une mise en situation populaire. Bonne vulgarisation de quelques principes freudiens. Si on cherche la genèse, la voici clairement: "C’est très autobiographique, explique Rose, 33 ans, avec humour et aplomb. Ma femme m’a forcé à avoir un enfant et je paniquais. Pour un homme, assumer sa paternité peut devenir très angoissant. Ce fut ma grossesse à moi, mais c’est un peu plus large que cela aussi… J’avais envie de parler des relations homme/femme, de faire un hymne à la femme, à la mère. C’est une variation sur l’histoire d’Odipe."

Que le réalisateur aime les femmes, cela ne fait aucun doute. En vrai amoureux, il aime tout, et multiplie les facettes, les colères, les roucoulades, les rides et les rires, les âges et les corps. Elles sont toutes de chair et de sang. Aimables et désirables parce que vues comme telles. À côté de Soeur, particulièrement neutre, Mère est une Madame de Merteuil enragée. Dans le genre salope suprême, Lanctôt caracole. Cadieux a du ressort comique à revendre et Lucie Laurier est comme un poisson dans l’eau. Ses amants qui défilent ont tous du relief, et Ahmarani, encore un peu en surjeu, devient touchant, surtout au rayon charcuterie de chez Milano.

Les références amoureuses sont là: Sébastien Rose démontre un amour de gourmand avec un générique ultra-maternel directement tiré du Huit et demi de Fellini, et un amour d’esthète avec Vivement dimanche de Truffaut. Conséquence directe: une sexualité très joyeuse, sans complexe et assumée. On chante du jazz, on boit, on baise, et la vie est belle. Rose déclare d’ailleurs qu’il aimerait ne pas perdre sa fraîcheur, sa naïveté, une certaine innocence; composantes nécessaires, selon lui, pour rester enfant et faire des films.

Et c’est là-dessus qu’il faut miser si l’on veut apprécier ce long métrage. S’arrêter à la première lecture du propos, bloquer sur les mots et les concepts échangés sur le féminisme et la place des femmes, c’est se boucher les yeux. Dire que le personnage de Patrick Huard (excellent) est un baiseur machissimo, c’est un fait. Froncer les sourcils et le juger nuisible serait une connerie. Monter sur ses grands chevaux parce que Rose fait d’abord passer le bonheur des femmes par l’enfantement serait aussi une imbécillité. Bien sûr que cela en est une! L’ironie du ton, qui est peu de mise au Québec, permet justement de respirer par le nez, et de tourner en dérision ces acidités qui engluent les lignes ouvertes et les conversations de salons. Le film est loin d’être parfait, le scénario part un peu dans tous les sens, et on se passerait de quelques scènes; mais s’il faut lui donner une qualité, c’est bien celle-ci: badiner sur un sujet qui est devenu un vrai boulet à force de sérieux.

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