Lost in la Mancha : Le rêveur
Cinéma

Lost in la Mancha : Le rêveur

Pour ceux qui pensent que le cinéma est un boulot de fous, voici un film qui va les conforter. Il s’agit du premier making of d’un film qui ne s’est pas fait. Alors que le genre sert à éclairer la construction d’une production, on assiste ici à sa désintégration en règle. Le roi de ce travail de Pénélope ne pouvait être que Terry Gilliam, et son film devait s’appeler The Man Who Killed Don Quixote. À la place, on se retrouve avec un documentaire, Lost in la Mancha, réalisé par Keith Fulton et Louis Pepe, amis de Gilliam, partis eux aussi pour la gloire dans l’intimité d’un des plus ambitieux projets cinématographiques jamais  entamés.

Pour ceux qui pensent que le cinéma est un boulot de fous, voici un film qui va les conforter. Il s’agit du premier making of d’un film qui ne s’est pas fait. Alors que le genre sert à éclairer la construction d’une production, on assiste ici à sa désintégration en règle. Le roi de ce travail de Pénélope ne pouvait être que Terry Gilliam, et son film devait s’appeler The Man Who Killed Don Quixote. À la place, on se retrouve avec un documentaire, Lost in la Mancha, réalisé par Keith Fulton et Louis Pepe, amis de Gilliam, partis eux aussi pour la gloire dans l’intimité d’un des plus ambitieux projets cinématographiques jamais entamés.

Visiblement, le héros de Cervantès ne se laisse pas approcher comme ça. Un grand comme Orson Welles s’y est attaqué, mais n’a pu l’achever. Et Terry Gilliam, capable de faire croire à un truc comme Brazil et de faire voler Le Baron de Munchausen (fiasco fracassant au box-office), pouvait lui aussi mettre en images la plus folle et romanesque épopée qui soit. L’idée de se battre contre des moulins à vent se répercute donc à l’infini. Voici l’histoire d’une déconfiture qui tient du sortilège: 10 ans de préparation pour Gilliam, deux tentatives de tournage, des mois pour amasser d’énormes fonds européens et ainsi s’affranchir de tout diktat hollywoodien; une équipe gigantesque et multiculturelle qui fonctionne dans un anglais trop imparfait pour discuter des détails; un studio espagnol qui résonne comme un hangar; une base de l’OTAN en Espagne comme premier lieu de tournage, avec des chasseurs qui sillonnent le ciel; un ouragan qui endommage le matériel, baignant le plateau dans la boue; des acteurs qui tardent (Vanessa Paradis, Johnny Depp, Jean Rochefort); l’équipe de figurants qui n’est pas prête; un cheval qui ne veut plus coopérer; et Jean Rochefort, Don Quichotte, qui se paye deux hernies discales, l’empêchant de remonter à cheval, et de tourner quelque film que ce soit. L’enfer. Une série de malchances qui aurait pu arriver à un Coppola aux Philippines.

Le documentaire s’attarde sur le rêveur en chef qui ne veut pas se réveiller. La qualité première de ce genre d’artiste, capable de filmer ses rêves les plus fous, est de tout croire possible. Voir Gilliam, 61 ans, rigoler de son rire de crécelle parce qu’il a trouvé des gueules de géants, parce que ses marionnettes articulées peuvent se battre avec les acteurs, ou parce que Rochefort en répétition a l’intonation de son héros, c’est s’attendrir devant un gamin ébahi devant son jouet… Les gueules moroses des pourvoyeurs de fonds et de son équipe s’accentuent de façon comique; tous se creusent les méninges pour trouver une définition au terme "force majeure", et la costumière italienne panique. Et Gilliam cherche encore à filmer! Le type est têtu. On espère voir son grand oeuvre un jour. Et là, il faudra refaire un making of.

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