Une femme de ménage : Lavage programmé
Cinéma

Une femme de ménage : Lavage programmé

Le fantasme ordinaire est coriace. Sa longévité le rend même sympathique. On parle d’amours ancillaires, de chair jeune et fraîche qui redonne vie au vieux barbon désabusé. Les plus gentils diront que telle est la loi des contraires qui s’attirent; les plus cyniques diront que c’est normal, c’est Claude Berri qui a fait le film. Une femme de ménage ne mérite pas qu’on se fâche: c’est gentil et tendre, simplement fait, pas difficile à digérer, voire à oublier.

Le fantasme ordinaire est coriace. Sa longévité le rend même sympathique. On parle d’amours ancillaires, de chair jeune et fraîche qui redonne vie au vieux barbon désabusé. Les plus gentils diront que telle est la loi des contraires qui s’attirent; les plus cyniques diront que c’est normal, c’est Claude Berri qui a fait le film. Une femme de ménage ne mérite pas qu’on se fâche: c’est gentil et tendre, simplement fait, pas difficile à digérer, voire à oublier.

Bien sûr, ça dépend où l’on se place. C’est un film de gars, scénarisé à partir d’un roman de mec (Christian Oster), avec un vrai type en personnage principal (Jean-Pierre Bacri). Entendre par là quadra et quinquagénaires qui trouvent appétissant un corps pulpeux dans une robe cheap, Vénus à l’esprit candide et pas psychologisant pour un sou. Et en plus, la fille (Émilie Dequenne) fait le ménage! Elle est souriante les mains dans l’eau de vaisselle et appliquée quand elle repasse. Lui peut lire une biographie de Dostoïevski, elle feuillette à peine les magazines people. C’est sûr que du point de vue féminin, ça peut coincer… Mais bon, les détails valent mieux que le parti pris général.

C’est l’été rue de Buci, et ça c’est bien. C’est là qu’habite Jacques (Bacri), morose depuis que sa femme l’a quitté. Il bosse, il dort, il mange, il écoute du jazz (le trio HUM, toujours aussi cool) et, comme lui, ses copains crèvent de solitude. Tout le monde est seul dans ce film. Pas d’attaches, pas de parents, juste des zombies qui déambulent au soleil et qui, en faisant leurs courses, sourient mécaniquement à la boulangère. Une jeune femme vient remettre de l’ordre et du désir dans sa vie, ce qui est plutôt gentil. Mais à 20 ans, on a paraît-il l’amour moins définitif qu’à 50. Retenons donc les détails de cette histoire de renaissance: le parler pour ne rien dire du quotidien qui tient lieu de conversation, dialogues finement écrits par Berri. Le frisson de Bacri quand Dequenne apparaît dans la porte, prête à un câlin. Un badinage en voiture sur la route de Quiberon, une main baladeuse. La précision tranquille des images, parisiennes et bretonnes. Une fille qui s’assoit en face d’un homme sur l’accoudoir du fauteuil et qui croise les jambes. C’est simplement amené, comme le désir. Et rarement alourdi. Le talent de Bacri, qui sourit beaucoup, qui ne grogne pas, et qui se laisse apprivoiser, y est pour quelque chose. Émilie Dequenne, la Rosetta des frères Dardenne, est ici plus solaire, plus belle, mais pas meilleure. Et elle fait le ménage.

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