Marie-Jo et ses deux amours : Ni avec toi, ni sans toi
Cinéma

Marie-Jo et ses deux amours : Ni avec toi, ni sans toi

Toujours Marseille, toujours les mêmes. Et pourtant, on embarque sans hésitation tant la confiance s’est installée. Délaissant le social pour renouer avec le sentimental, Robert Guédiguian (Marius et Jeannette, La ville est tranquille) signe Marie-Jo et ses deux amours (sélection officielle à Cannes), un mélodrame éprouvant qui reprend avec finesse un schéma bien connu.

Toujours Marseille, toujours les mêmes. Et pourtant, on embarque sans hésitation tant la confiance s’est installée. Délaissant le social pour renouer avec le sentimental, Robert Guédiguian (Marius et Jeannette, La ville est tranquille) signe Marie-Jo et ses deux amours (sélection officielle à Cannes), un mélodrame éprouvant qui reprend avec finesse un schéma bien connu.

Marie-Jo (merveilleuse Ariane Ascaride, en nomination pour le César de la meilleure actrice) n’en peut plus: elle aime son mari Daniel (émouvant Jean-Pierre Daroussin) tout autant que son amant Marco (sobre Gérard Meylan). Avec le mari, l’amour est devenu banal, les corps s’aiment sans trop frémir et le silence s’est installé depuis trop longtemps. Avec l’amant, on souffre de ne pas pouvoir s’aimer plus longtemps, de ne pas connaître tous les détails intimes, et le cellulaire s’avère la plus précieuse alliance.

Avec son regard tendre mais clinique, le cinéaste marseillais rend parfaitement compte de l’amour au quotidien. Des larmes furtives, des paroles creuses, des silences lourds de sens, des regards vaguement ennuyés ou enamourés. Le résultat est si criant de vérité que ça devient presque dérangeant, voire confrontant. Cruel même. Comment rester de glace devant Marie-Jo chantant Je suis malade de Lama, la voix cassée, véritable cri d’amour étouffé à son amant qui se fait peu à peu distant? Malade d’amour, elle l’est. Plus encore, c’est d’un mal de vivre incurable qu’elle souffre.

En filigrane, on retrouve quelques préoccupations sociales chères au réalisateur. Les ambulanciers débraient quelques heures – le temps que Marie-Jo refasse le plein de tendresse chez Marco -; les apprentis maçons de Daniel revendiquent un meilleur salaire; un vieillard malade et alcoolique n’a plus que ses souvenirs comme compagnons. Et toujours le soleil brûlant du Midi qui illumine chaque scène.

Dès les premières images, on appréhende la grande tragédie: Marie-Jo effleure son poignet avec la lame de son couteau. Guédiguian nous servira-t-il une conclusion semblable à celle de La Femme d’à côté, de Truffaut? Le malheur frappera inévitablement, mais pas de la façon attendue. La conclusion semble paresseuse sur le coup, pour ensuite paraître probable, le destin étant parfois si absurde. À tout moment, on risque de verser dans le gros mélo, mais le jeu parfait des interprètes et le parti pris naturaliste de Guédiguian sauvent immanquablement la mise.

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