L'Immortalité en fin de compte : Que du brut
Cinéma

L’Immortalité en fin de compte : Que du brut

Le désir de créer sans questionnements, d’y aller de ses deux mains sans l’influence de quiconque, en autodidacte, seul dans son coin: tel est le sujet du documentaire L’Immortalité en fin de compte, de Pascale Ferland. Elle s’attarde au parcours pour le moins pittoresque de trois hommes en pleine pratique de l’art brut.

Ils sont poussés par l’envie de façonner les objets et n’ont reçu aucune formation, pour ainsi dire. Léonce Durette, ancien menuisier, décore de pièces de bois multicolores sa maison de Saint-Ulric, en Gaspésie. Un bijou de formes insensées, en dedans comme au dehors. Le défunt Roger Ouellette travaillait passionnément le ciment et le béton pour en extraire des formes humaines, sculptures grossièrement "gossées", mais captivantes. Et Lionel Thériault, du Bas-Saint-Laurent, parsème sa terre d’objets hétéroclites, allant de drapeaux canadiens à des cordes à linge permanentes.

Certains diront: "Quel intérêt, c’est laid à crever sur place, cet art brut." Pourtant, la démarche de Ferland dégage bien l’impossibilité pour ces hommes d’arrêter, et cela devient véritablement beau de les voir à l’oeuvre. Dans chaque cas, l’activité a débuté modestement, puis, semblable à un mal rampant, a pris de l’ampleur. Par le biais de photos et de témoignages de la famille, on voit l’ahurissante progression, et il faut dire qu’il y a de quoi sourire, surtout quand la fille de Ouellette, Élisette, raconte l’invasion de la maison par les solides personnages, ou quand la femme de Durette explique qu’il faut trois mois pour faire le nettoyage au complet de cet intérieur bondé de fioritures de bois teint. On est conscient de la simplicité quasi naïve de l’acte créateur de ces artistes, certes, mais on ne peut que trouver l’entreprise fascinante quand brillent les yeux de Thériault lorsqu’il discourt sur ses cordes à linge. Cette attrayante visite d’un coin indiscipliné de l’art passe autant de temps sur les artistes que sur les oeuvres, n’oubliant pas les embûches respectives. Car ces hurluberlus ont eu maille à partir avec leur localité à un moment ou un autre, et Ferland pose un regard plein de chaleur humaine sur des gens qui passent pour des incompris. Que cet art nous atteigne ou pas, L’Immortalité en fin de compte a le mérite de provoquer une bonne dose d’empathie.

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