Tan de Repente : À l'ombre des jeunes filles en fleurs
Cinéma

Tan de Repente : À l’ombre des jeunes filles en fleurs

Tourné en noir et blanc avec peu de moyens, Tan de Repente (Tout à coup), premier long métrage du réalisateur argentin Diego Lerman, a bien failli ne pas voir le jour tant les états de siège et les manifestations violentes ont freiné son tournage… sans parler de l’argent qui tardait à rentrer.

Tourné en noir et blanc avec peu de moyens, Tan de Repente (Tout à coup), premier long métrage du réalisateur argentin Diego Lerman, a bien failli ne pas voir le jour tant les états de siège et les manifestations violentes ont freiné son tournage… sans parler de l’argent qui tardait à rentrer. À l’instar de ce tournage chaotique, le parcours initiatique de Marcia (émouvante Tatiana Saphir), vendeuse de lingerie complexée par ses quelques kilos en trop, sera riche en imprévus. Un film n’aura jamais si bien porté son titre.

En effet, peu après avoir installé un univers morose où errent des passants à la mine longue, Lerman fait soudainement tout basculer en plantant sur le chemin de Marcia deux filles aux allures de garçons manqués, Mao et Lenin (impétueuses Carla Crespo et Veronica Hassan). Ne croyant pas à la déclaration d’amour de Mao, Marcia se voit forcée de suivre le duo de choc à la pointe d’un couteau, car la rebelle désire emmener l’élue de son coeur à la mer comme preuve d’amour.

De la mer jusqu’à la demeure de la vieille tante de Lenin (gracieuse Beatriz Thibaudin), les jeunes filles se dévoilent les unes aux autres, tantôt avec pudeur, tantôt avec fracas. Puis, le silence s’installe et l’on se délecte d’une cigarette ou d’un maté. Chaque fois, les scènes semblent s’allonger, faute d’inspiration, comme si Lerman et sa coscénariste Maria Meira n’avaient pu approfondir le récit de La Prueba (La Preuve), adaptation d’une nouvelle de César Aira et cinquième court métrage de Lerman, qui est à l’origine de Tan de Repente. Puis, contre toute attente, un coup de théâtre replace l’histoire sur de nouveaux rails.

Alors que d’autres représentants de la "nouvelle vague" du cinéma argentin (Lucrecia Martel, Adrian Caetano) ancrent de plain-pied la fiction dans la réalité sociopolitique de l’Argentine, le jeune réalisateur de 27 ans, issu du théâtre et de la pub, l’évoque en catimini par le biais du mal de vivre de trois jeunes filles en cavale. Déroutant par son rythme et ses apparences anodines, Tan de Repente trahit un regard sensible empreint de douce ironie. Mais, plus encore, il prouve hors de tout doute que le cinéma argentin se porte très bien malgré le marasme économique qui risque de l’étouffer.

Voir calendrier
Cinéma exclusivités