Les films de l’été : Sous le soleil du ciné
L’été, le cinéma populaire se lâche, les ciné-parcs ouvrent, les enfants ont le droit de s’ennuyer, et ceux qui souffrent de la chaleur ont besoin de se rafraîchir durant deux heures. Toutes les raisons sont bonnes pour aller au ciné. Même pour voir des bons films.
La peinture à numéros
On a d’abord les productions à chiffres. Bien qu’il y ait souvent déperdition de qualité avec les suites, les studios encaissent quand même avec entrées et produits dérivés. Nous verrons donc cet été American Wedding (après le sexe, le mariage: la suite d’American Pie), Legally Blonde 2: Red, White and Blonde (où Reese Whiterspoon part à l’attaque de Washington), Charlie’s Angels: Full Throttle (où les trois copines réalisent encore des trucs incroyables), When Harry Met Lloyd: Dumb and Dumberer (nous remontons à la source de la bêtise, celle du film des frères Farrelly), Terminator 3: Rise of the Machines (Arnold, vieux robot, est le seul à replonger: James Cameron, Linda Hamilton et Edward Furlong ont déclaré forfait), Bad Boys 2 (le même duo huit ans plus tard, Will Smith et Martin Lawrence), Spy Kids 3-D: Game Over (les enfants espions sont prisonniers d’un jeu vidéo, et c’est en trois dimensions), Lara Croft Tomb Raider: The Cradle of Life (Angelina Jolie, en deux dimensions). Et ce n’est pas encore une franchise, mais ça viendra: The League of Extraordinary Gentlemen, LXG, de Stephen Norrington (Blade), bande de super héros opérant dans un monde victorien parallèle tirée d’une BD. Avec Sean Connery. Toujours prêt…
Les gros canons
Les films dont on connaît la teneur rien que par la bande-annonce, mais qu’on ira voir quand même. Il a encore des fans, malgré les daubes accumulées: Johnny Depp revient en une version moins chromée de Douglas Fairbanks Jr. dans Pirates of the Caribbean: The Curse of the Black Pearl, production de Jerry Bruckheimer et réalisation de Gore Verbinski (The Ring, The Mexican). Ang Lee est un réalisateur étonnant (Crouching Tiger…, The Ice Storm, Sense and Sensibility); le voilà aux commandes de The Hulk, le géant vert en colère, qui aura les traits de l’Australien Eric Bana. Après Spider-man, on peut monter un film sur les épaules de Tobey Maguire, même une histoire (vraie) de cheval, héros de la Grande Dépression: Seabiscuit, tel est le nom de l’équidé que monte Maguire, dans un film de Gary Ross (Pleasantville). Ridley Scott a quant à lui laissé les jupettes de Gladiator et les hélicos de Black Hawk Down pour revenir sur terre avec Matchstick Men, une comédie dramatique au design californien, où Nicolas Cage joue un criminel qui aime son boulot mais qui a du mal à le faire, étant obsessif-compulsif. Et s’il n’en fallait qu’un, Marin Karmitz l’a numérisé exprès pour nous: Les Temps modernes, de Charles Chaplin, chef-d’oeuvre de 1936, magnifique transition du muet au parlant. À voir, revoir, et à conserver.
Les curiosités
Les films qui pourraient nous surprendre, en bien comme en mal. Johnny English, par exemple, nouvel espion débile dans la peau de Rowan Atkinson, où nous verrons si Mr. Bean peut faire rire en 007. American Splendor est amusant. Version ciné de la morne vie du cartooniste underground Harvey Pekar, un film surtout intéressant dans le mélange dessin, fiction et documentaire. Shaolin Soccer aussi semble drôle (une équipe de foot utilise les arts martiaux à son avantage), un film de 2001 qui a eu le temps de faire trois fois le tour du monde avant d’atterrir ici. Parce que c’est un bon acteur et qu’il prend souvent des chemins de traverse, on attend également Philip Seymour Hoffman dans Owning Mahowny, de Richard Kwietniowski, histoire vraie (et canadienne) d’un banquier accro au jeu. Que dire de Buffalo Soldiers? Une comédie militaire au moment de la chute du mur de Berlin, datant de 2001, mais qui tombe bien dans le cynisme actuel face aux choses de la guerre. Avec Joaquin Phoenix, Anna Paquin et Ed Harris. Et puis, il y a la liste des comédies romantiques, pratiques pour les câlins dans le noir: I Capture the Castle, The Guests, ou la comédie musicale Camp. Harry Knowles, du site Ain’t it Cool News, prévoit le navet de l’été avec Gigli, de Martin Brest (Beverly Hills Cop, Scent of a Woman), car Ben Affleck réussit à rendre hétéro une Jennifer Lopez lesbienne! Rien ne l’arrête, ce Ben. On peut craindre aussi du côté de Wanted, film du scénariste Brad Mirman, où Gérard Depardieu, Renaud, Harvey Keitel et Johnny Hallyday se la jouent en gangsters nuls. L’accroche sur l’affiche en dit long: "Ils vont braquer l’Amérique "…
Les Euros
Dans le courant de l’été, sans confirmation de dates, on attend (avec angoisse ou délice) le dernier film de Claude Lelouch, And Now Ladies and Gentlemen, où Jeremy Irons se prend pour Jeremy Irons et Patricia Kaas, pour une princesse du désert. Il faudra aussi supporter L’Adversaire, de Nicole Garcia, avec un Daniel Auteuil totalement éteint. Agnès Jaoui est sensible dans le rôle de l’amoureuse dans 24 Heures dans la vie d’une femme, d’après le roman de Stefan Zweig, un film de Laurent Bouhnik (Zonzon). Dans Sex is Comedy, Catherine Breillat nous joue le coup de la représentation, du réel au cinéma, et caricature son travail avec les acteurs. Avec Grégoire Collin et Anne Parillaud. À voir. Drame en prévision avec Le Fate Ignoranti de Ferzan Ozpetek et Choses secrètes de Jean-Claude Brisseau (Noce blanche), et thriller moderne annoncé pour Corps à corps de François Hanss, avec Emmanuelle Seigner et l’excellent Philippe Torreton.
Pour rire, il y aura Rires et Châtiments, premier film d’Isabelle Doval, qui fait jouer son mari, José Garcia, un type qui prend la vie à la légère mais qui doit tout de même composer avec les cadavres qui l’entourent. Et Fanfan la Tulipe, de Gérard Krawczyk, avec Vincent Perez et Penélope Cruz, remake couleur du film de 1952, pourra peut-être en dérider quelques-uns. Restent deux gros morceaux: fracas d’images et de visages pour La Vie nouvelle de Philippe Grandrieux (Sombre), vu au FCMM, et Dirty Pretty Things, de Stephen Frears, aimé au Festival de Toronto, où Audrey Tautou apprend les difficultés de l’immigration dans le Londres contemporain. Enfin, pour clore en français, c’est du côté de chez Max Films que vient un autre genre de comédie québécoise. Après la farce façon Les Boys, l’absurde façon Québec-Montréal, l’ethnique façon Mambo Italiano, l’intello façon Comment ma mère…, etc., voici l’humour façon british, une réalisation sympathique et enlevée: La Grande Séduction, de Jean-François Pouliot, avec Lucie Laurier et David Boutin. Bon cinéma.