Un toit, un violon, la lune : Les grandes espérances

Un artiste prend-il sa retraite? Comment pourrait-il… Créées il y a moins de 20 ans, les habitations pour artistes retraités le Chez-Nous des Artistes en accueillent pourtant une centaine. Mais ce ne sont pas des vieux comme les autres. Souvenez-vous du superbe documentaire Le Baiser de Tosca, sur la Casa Verdi à Milan, où des musiciens et chanteurs vivaient encore dans l’émotion de l’art, dans l’espoir de performer encore et encore: c’est la même chose pour ce documentaire, Un toit, un violon, la lune, de Carole Laganière, qui a remporté le prix du meilleur documentaire canadien au Hot Docs 2003. Dès que la caméra s’allume, les artistes entrent en scène, quel que soit l’âge et les désillusions. Souvent sans enfant, entourés de peu de famille, les artistes conservent leurs rêves bien au chaud et le côté saltimbanque qui en découle; ils gardent cette faculté vitale de rendre le quotidien fantaisiste, de se mettre en scène. Et les décorations sur le pas de leur porte ne sont que les premiers témoins de cette énergie.

Bien sûr, le film, c’est radio nostalgie, du temps passé et de l’émotion à chaque étage. De la tristesse aussi, celle de ne plus exercer son art. Mais le film baigne dans cet improbable mélange dont les personnes âgées ont le secret; celui d’une grande lucidité teintée des plus grands espoirs. La fin est proche (et certains la voient arriver en nombre de bières et de cigarettes) et les rêves sont encore immenses! On découvre cette magnifique femme, Corina Lac, qui n’a besoin que d’un toit, d’un violon et de la lune pour faire renaître la magie du chant et qui veut voir son autobiographie publiée; la passion est toujours actuelle pour des jazzmen comme Émile Cisco Normand et Ti-Guy Nadon, tout comme les envies de music-hall de Terri Vanier ou l’amour des mots de Jean Côté. Artistes, à la vie, à la mort.

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