Philippe Noiret : Journée d'Amérique
Cinéma

Philippe Noiret : Journée d’Amérique

Profitant de son passage à Montréal pour faire la promotion de Père et fils, premier long métrage du comédien-humoriste Michel Boujenah, PHILIPPE NOIRET présentera sur la scène du Monument-National Les Contemplations, spectacle intimiste où le grand acteur nous fait redécouvrir la poésie de Victor Hugo. Rencontre.

De haute stature, vêtu avec une élégance singulière, Philippe Noiret fait une entrée discrète mais néanmoins remarquée dans le hall de l’hôtel où il séjourne. Dès que sa voix, si riche et reconnaissable entre toutes, envahit les lieux, des milliers d’images surgissent à l’esprit, de Zazie dans le métro de Louis Malle aux Lunettes d’or de Giuliano Montaldo, en passant par Coup de torchon de Bertrand Tavernier. Avec une bonhomie presque nonchalante, il se prête gracieusement à l’exercice de l’entrevue, avouant que c’est à la lecture du premier jet du scénario de Père et fils, écrit par Pascal Elbé, Edmond Bensimon et Michel Boujenah, qu’il a voulu faire partie de cette aventure: "Je savais que quelqu’un qui écrit des récitals est quelqu’un qui travaille, on ne peut pas monter des spectacles de deux heures sans être quelqu’un de travailleur. Je me suis dit: on peut y aller, car Michel Boujenah allait mettre la même énergie dans son film."

Cette énergie, on la retrouve tout au long de Père et fils, un film chaleureux et sympathique, à l’image de Boujenah qui avait séduit les Québécois en présentant un numéro à la fois drôle et touchant sur son père au Festival Juste pour rire il y a une quinzaine d’années. Avec une truculence irrésistible, Noiret y incarne Léo, un père veuf qui décide d’emmener ses trois fils (Charles Berling, Pascal Elbé et Bruno Putzulu) au Québec pour voir les baleines, dans le but de les réconcilier. Pour y arriver, Léo devra leur faire croire que son état de santé est précaire. Lors de leur périple au Québec, ils croiseront des personnages colorés, voire pittoresques, interprétés par Pierre Lebeau et les délicieuses, pour reprendre l’expression de Noiret, Geneviève Brouillette et Marie Tifo. Contrairement aux autres coproductions franco-québécoises, on a permis aux acteurs québécois de préserver leur accent: "Mais c’est la moindre des choses, s’exclame Noiret, ça doit être très agaçant de ne pas reconnaître son accent!"

Vous êtes-vous reconnu dans ce personnage que vous qualifiez de gentil voyou, ce Léo qui fait un pied de nez à la mort?

"Les chemins qui vous mènent à un personnage sont à la fois les vôtres et ceux du personnage, explique le comédien septuagénaire, alors on essaie de faire coïncider les choses. Rendu à un certain âge, on n’a plus ce sentiment d’urgence, car ce n’est pas la peine de se presser, on va y arriver de toute façon, sauf qu’on a une façon de savourer les choses auxquelles on ne faisait pas attention 20 ans auparavant parce qu’elles nous paraissaient aller de soi."

La rencontre entre les Français et les Québécois s’est bien déroulée?
"Oui, car du côté français, ce sont des gens qui ont été marqués par la comédie à l’italienne, ce mélange de drôlerie, de dérisoire et de dérision, une tradition à laquelle j’ai un peu appartenu bien que je sois un homme du Nord. Au Québec, vous avez un côté méridional, naturellement expansif; on s’est donc régalé tous ensemble et on a passé des moments absolument agréables. Nous sommes même restés en contact."

Du théâtre au cinéma
Vous vous définissez comme un acteur de théâtre qui a bien réussi au cinéma. Qu’est-ce que l’un a apporté à l’autre, et vice versa?
"C’est difficile d’analyser ça, surtout que je ne suis pas très bon dans l’autoanalyse… commence Noiret. Disons que la scène nous apprend à aborder les personnages, à les travailler en profondeur. Le théâtre nous apprend aussi une certaine discipline technique concrète, à respirer large, ce qui n’est pas interdit au cinéma, contrairement à ce qu’on pourrait croire. Dans l’autre sens, le cinéma m’a apporté, quand je travaille pour le théâtre, une façon de préparer les choses en les laissant venir, en me laissant porter par le jaillissement et la spontanéité."

Le théâtre, c’est le lieu privilégié pour rencontrer les grands auteurs, comme Shakespeare et Musset que vous avez joués. Est-ce cela qui vous a poussé vers la scène?
"Ça a beaucoup joué, avoue Noiret, d’abord parce que c’est une formation formidable. D’ailleurs, quand je suis remonté sur scène après 30 ans, c’était ce qui me manquait vraiment, le plaisir physique de la langue. Un plaisir que vous n’avez pas toujours au cinéma."



Les Contemplations de Victor Hugo, par Philippe Noiret
En 1953, le jeune Philippe Noiret a eu le coup de foudre en entendant John Gielgud, le grand comédien anglais, réciter des sonnets et monologues de Shakespeare. Depuis, l’idée lui trottait dans la tête de faire quelque chose de similaire, dans la langue de Molière cette fois. Quelques décennies plus tard, il arrêtait son choix sur le poète français dont les textes, selon lui, se prêtaient le mieux à l’exercice: Victor Hugo, le monstre sacré, auteur d’une déferlante poétique intitulée Les Contemplations.

Les Contemplations, considérées par plusieurs comme le sommet de l’art hugolien, c’est 11 000 vers, 158 poèmes écrits entre 1834 et 1855, une démonstration de souffle et d’imagination. L’an dernier, la performance a tenu l’affiche pendant plusieurs semaines à Paris, puis tourné dans les principales villes de France, de Belgique et d’Italie. "Une grande heure de magie!" écrivait Michel Cournot, du Monde, le lendemain d’une représentation. Voilà que le papi du cinéma français nous fait l’honneur de sa visite, lui qui n’a pas foulé une scène montréalaise depuis… 50 ans!

La démesure inspirée des Contemplations, la profondeur vocale et la présence légendaire de Philippe Noiret, tout cela conjugué en un one man show d’exception. (Tristan Malavoy-Racine). Du 11 au 21 septembre au Monument-National

Les Contemplations de Victor Hugo, par Philippe Noiret
En 1953, le jeune Philippe Noiret a eu le coup de foudre en entendant John Gielgud, le grand comédien anglais, réciter des sonnets et monologues de Shakespeare. Depuis, l’idée lui trottait dans la tête de faire quelque chose de similaire, dans la langue de Molière cette fois. Quelques décennies plus tard, il arrêtait son choix sur le poète français dont les textes, selon lui, se prêtaient le mieux à l’exercice: Victor Hugo, le monstre sacré, auteur d’une déferlante poétique intitulée Les Contemplations.

Les Contemplations, considérées par plusieurs comme le sommet de l’art hugolien, c’est 11 000 vers, 158 poèmes écrits entre 1834 et 1855, une démonstration de souffle et d’imagination. L’an dernier, la performance a tenu l’affiche pendant plusieurs semaines à Paris, puis tourné dans les principales villes de France, de Belgique et d’Italie. "Une grande heure de magie!" écrivait Michel Cournot, du Monde, le lendemain d’une représentation. Voilà que le papi du cinéma français nous fait l’honneur de sa visite, lui qui n’a pas foulé une scène montréalaise depuis… 50 ans!

La démesure inspirée des Contemplations, la profondeur vocale et la présence légendaire de Philippe Noiret, tout cela conjugué en un one man show d’exception.

(Tristan Malavoy-Racine)

Du 11 au 20 septembre
Au Monument-National
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