

Entretien avec Érik Canuel : Destins croisés
Après La Loi du cochon (2000) et Hemingway: A Portrait (2000), le réalisateur ÉRIK CANUEL nous offre une comédie romantique qui ne fait pas dans le grand Art, mais dans le divertissement sympathique.
Séverine Kandelman
Céline (Michèle Barbara Pelletier), jeune et belle romancière, a du mal à vivre de son écriture. À la veille de faire publier son deuxième livre, elle se sent particulièrement vulnérable, le premier ayant été incendié par le cynique et prétentieux critique littéraire Félix Legendre (Patrick Huard). Forcés par des circonstances cocasses, ces deux personnages se retrouvent à faire du bénévolat pour Opération Nez Rouge durant la période des Fêtes. Félix tombe littéralement sous le charme de Céline. Mais alors qu’il n’a pas reconnu en elle la jeune femme qu’il avait fustigée quelques années auparavant, celle-ci en profite pour se venger doucereusement…
À base de dandysme, de lunettes à la mode et de bouche en cul-de-poule, Nez Rouge tourne le milieu critique en dérision. Alors, question incontournable: sommes-nous si imbuvables et hautains que ça? "Non, pour moi, c’est juste un clin d’oeil. Il n’y a aucune méchanceté là-dedans, j’ai simplement essayé d’être honnête. Les critiques sont des êtres humains, il ne faut juste pas qu’ils soient virulents pour être virulents, qu’ils écrivent des choses simplement pour
Le réalisateur Érik Canuel nous offre une comédie romantique qui ne fait pas dans le grand Art, mais dans le divertissement sympathique. "Autant j’ai un sens développé comme artiste, c’est-à-dire que je veux être intègre vis-à-vis de mon art, autant j’ai un côté commercial qui comprend que le cinéma, c’est aussi une business. Quand tu fais un film, tu veux qu’il se vende et que les gens le voient. Je fais donc un cinéma qui est divertissant… parce que je veux que tout le monde vienne. De l’intellectuel au mineur, au livreur de bière, ce sont tous des gens qui comptent pour moi. Si mes messages sont d’ordre émotif, sociétal, tout le monde va les comprendre. T’as du plaisir, t’as pleuré, ça t’a donné le goût de rêver, c’est ça qui compte. La culture n’appartient pas à l’élite… mais qu’on s’entende: le cinéma populaire, ça ne veut pas dire que tu nivelles par le bas. Je suis un cinéaste qui fait des films d’auteur commerciaux."
Seriez-vous d’accord pour dire que Nez Rouge est de facture quand même assez américaine? "Non. Britannique. Les comédies romantiques américaines n’ont pas la même finesse. Je me suis basé beaucoup plus sur l’intelligence, la non-prétention de cet humour que les Américains n’ont pas. Mais, c’est vrai que c’est léché comme un film américain."
Visuellement parlant, Nez Rouge est vif, éclaté, indéniablement marqué par le passage de Canuel dans le milieu du vidéoclip. "Je suis graphiquement très difficile. J’ai déjà voulu être peintre, j’ai fait de la bande dessinée… Je suis très axé arts visuels. Mon père m’a toujours dit: "Ça s’appelait des moving pictures avant." Il y a donc une recherche graphique pour faire en sorte que l’image parle autant que le texte. C’est important que ce soit beau pour les yeux. Alors je dis à mes directeurs photo exactement ce que je veux. À tous les niveaux. Je travaille avec des gens hyper-talentueux à qui je suis capable de déléguer, mais il reste que je touche à tout."
À travers des gags drôles, comme d’autres plus lourds, le film rend bien le côté onirique de cette période des Fêtes. "Je voulais véhiculer le rêve d’enfance de Noël. La petite lumière dans l’oeil, la joie que cette fête peut apporter. Il y a toujours ce moment magique entre les gens à cette période de l’année. Pour moi, cette magie-là est importante. On vit dans une noirceur perpétuelle, les nouvelles sont toujours noires. Tout est bad tout le temps… Est-ce que ça peut être positif des fois?"
Habité par ces bons sentiments, Érik Canuel signe une petite comédie de Noël légère et amusante. Rien de plus, rien de moins.
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