Mona Lisa Smile : Les petites filles modèles
Ce qui s’annonçait comme un Dead Poets Society en talons hauts ou un The Prime of Miss Jean Brody à l’américaine ne s’avère qu’une banale leçon de féminisme 101 – c’est Simone de Beauvoir qui doit se retourner dans sa tombe – dénuée de profondeur psychologique et agrémentée de la présence de Julia Roberts. Or, malgré son charisme indéniable, la pretty woman de 37 ans paraît bien pâle face à son cortège de dauphines potentielles, Julia Stiles en tête, lesquelles semblent savoir qu’un sourire, si éclatant soit-il, ne suffit pas à faire oublier les carences d’un scénario aussi subtil qu’un vieil épisode de L’Amour avec un grand A de Janette Bertrand.
Campée en 1953, l’intrigue on ne peut plus convenue de Mona Lisa Smile, inspirée d’un article sur les années de collège d’Hillary Clinton, relate le prétendu vent de subversion qu’apporte une professeure d’histoire de l’art trentenaire (Roberts) – et, ô comble de l’horreur, toujours célibataire! – qui troublera l’esprit d’une horde de brillantes et jolies demoiselles (Stiles, Kirsten Dunst, Maggie Gyllenhaal et Ginnifer Goodwin, convaincues et convaincantes) qui jusque-là ne rêvaient que de se faire passer la bague au doigt et de se voir offrir un magnifique ensemble laveuse-sécheuse par un mari blanc de droite. Prise en grippe par les petites snobinardes dès le premier cours, Katherine Watson deviendra, le temps de présenter quelques diapos dénonçant le sort des ménagères, l’idole de ses jeunes élèves. Au grand dam de Betty (Dunst), nouvelle mariée séchant ses cours, qui s’empressera de la dénoncer dans un éditorial du journal de l’école.
En fait, le grand scandale que provoque le personnage de Julia Roberts, que l’on prend difficilement au sérieux, aux yeux de la distinguée académie, hormis le fait d’encourager les élèves à penser par elles-mêmes en leur présentant des ouvres d’artistes ne figurant pas au programme, sera de pousser une future mariée (Stiles) à remplir une demande d’admission en droit à Yale. C’est fou l’effet qu’a une toile de Jackson Pollock sur les jeunes filles en fleur! À cet exemple peu subtil d’émancipation féminine s’ajoutent des intrigues amoureuses où chaque mâle se révèle un colon sans colonne vertébrale. Décidément, on fait fi des nuances dans cette élégante carte postale pastel – ah! les mignons bibis et les chics robes! – des années 50.
Peu mémorable – on retiendra uniquement la performance drôle et touchante de Marcia Gay Harden en professeure de diction et bonnes manières un peu fêlée -, Mona Lisa Smile de Mike Newell (Four Weddings and a Funeral) fait paraître la libération de la femme aussi complexe qu’une bataille d’oreillers entre fillettes dégourdies. Qui plus est, alors qu’elle prêche l’affirmation de soi et fait l’éloge de la différence, cette inoffensive comédie dramatique possède une facture archi-conventionnelle, pour ne pas dire insipide. Et par-dessus le marché, on nous casse les oreilles avec une horrible chanson d’Elton John et de son fidèle complice Bernie Taupin pendant que défilent en guise d’épilogue des films d’archives représentant des femmes exceptionnelles. Juste bon à louer un dimanche après-midi de pluie.
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