Entretien avec Noémie Godin-Vigneau : Le plus vieux métier du monde
D’où provient l’inspiration artistique? De quoi est-elle nourrie? Signé Claude Fournier (The Book of Eve, J’en suis, Les Tisserands du Pouvoir, Bonheur d’occasion…), le drame intimiste Je n’aime que toi, nous entraîne au cœur de cette énigme insoluble.
Georges Guérin (Michel Forget) est un auteur réputé à court d’inspiration. Installé dans une maison confortable auprès d’une bobonne aux petits soins (Dorothée Berryman), il n’arrive plus à écrire. Ce, jusqu’au jour où il fait la rencontre de Daisy (Noémie Godin-Vigneau) qui lui dit pratiquer le plus vieux métier du monde: putain. Pendant des semaines, les deux se donnent rendez-vous dans un café où la jeune femme raconte des souvenirs que l’écrivain romance sur les pages blanches de ce qui deviendra son manuscrit. Mais qui est au juste cette mystérieuse Daisy? Au fil des conversations, une relation singulière s’établit entre ces êtres désespérés. "Ils sont fascinés l’un par l’autre… L’amour se passe surtout au niveau des mots, comme s’ils étaient amoureux de leurs récits. Et puis il y a un attachement, une tendresse, une gratitude qui se dégage de leurs rencontres."
Noémie Godin-Vigneau explique avoir été séduite par le scénario. "Cette histoire m’a touchée. Je trouvais le personnage de Daisy mystérieux, complexe. Et puis je l’ai vu comme pouvant être un personnage imaginaire. Une incarnation de l’inspiration artistique de l’auteur… J’aimais cette réflexion sur l’espèce d’ébranlement que peut induire la création. Le fait que l’inspiration arrive à un moment donné, génère une remise en question, puis soudain disparaisse. Voilà alors un livre de terminé, une nouvelle page blanche… Et puis je trouvais qu’il y avait de belles choses dans le récit de prostitution de cette jeune femme. C’était intéressant parce que cela sortait de l’habituel cliché sur le sujet. Il y avait ce mélange de langage très froid, très cru par rapport aux choses, et en même temps, toujours une volonté littéraire, poétique."
Comment vous êtes-vous préparée au rôle? Avez-vous fait des recherches auprès de prostituées pour savoir comment elles parlaient de leur métier?
"Un peu, mais Claude, le réalisateur, en a fait plus que moi. Alors il m’a communiqué ses idées. J’ai écouté, j’ai lu, j’en ai parlé avec du monde, mais en même temps, je ne voulais pas que Daisy soit l’incarnation ultra-réaliste d’une prostituée… Avec Claude, on a eu plusieurs rencontres avant le tournage, afin de discuter, construire un cadre plus ou moins précis au personnage, établir des balises. On a aussi parlé des scènes de dévoilement physique, parce que pour moi c’était important que ce soit la dramatique qui passe d’abord et avant tout à travers ça… La mise en scène du film étant très simple, il s’agissait alors surtout de me plonger dans le récit."
Dans le film, votre personnage s’exprime dans une langue crue. A-t-il été difficile pour vous de trouver le ton juste?
"Oui. Ça a été tout un travail. Je me suis mise à apprendre mes textes longtemps à l’avance… Et puis j’ai bâti tout un imaginaire derrière ces histoires… Je voulais mettre plein de douceur et surtout, aucune vulgarité dans des affaires qui sont pourtant extrêmement crues."
Chose réussie. La jeune actrice défend très bien ce rôle difficile, proposant une interprétation sensible, touchante de son personnage. Pour le reste, le film s’avère inégal, arborant dialogues un peu surfaits et mise en scène artificielle. Dommage.
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