The United States of Leland : Étranger à soi-même
On ne compte plus le nombre de cas où de jeunes mineurs commettent l’irréparable. Tueries dans des écoles secondaires, assassinats gratuits… La liste est longue, accablante. Comment expliquer de tels actes? On connaît la chanson: instabilité de la cellule familiale, violence exacerbée par la télé… Les interprétations abondent mais restent sommaires face au tragique du geste. C’est ce domaine de l’inexplicable que Matthew Ryan Hoge, réalisateur-scénariste ayant lui-même enseigné dans un centre de détention juvénile, s’est proposé d’explorer avec ce premier long-métrage, descente plus ou moins réussie aux confins de la condition humaine.
L’histoire est digne d’un téléfilm du dimanche. Par une belle journée printanière, dans une banlieue typiquement américaine, Leland Fitzgerald (Ryan Gosling) poignarde le jeune frère autiste de son ex-petite copine (l’émouvante Jena Malone). Rien ne laissait entrevoir le caractère meurtrier de cet adolescent, fils d’un réputé écrivain (Kevin Spacey) et d’une mère attentionnée (Lena Olin), qui se voit alors placé dans un centre de détention juvénile. Là, Leland se confie à Pearl (Don Cheadle), son professeur d’histoire qui, un soupçon arriviste, se met en tête d’écrire un roman sur la vie de l’inculpé, l’interrogeant sur les motivations de son geste. Mais la vérité est loin d’être simple et au fil des entretiens, c’est l’écrivain même qui se met à reconsidérer la portée de ses choix moraux.
Le film s’ouvre de manière intelligente. Se refusant de céder au sensationnalisme, le réalisateur montre l’étrangeté de cet acte meurtrier (on sent là l’influence d’Albert Camus) par des images en décalage, toutes de printemps et de lumière. À travers une structure narrative faite de flash-back, Matthew Ryan Hoge raconte le caractère trouble de la vérité. Il signe une réflexion sur la fragilité, l’aliénation dans laquelle peut sombrer l’être humain. Un propos antimanichéen qui tire cependant trop vers la leçon pour qu’on y adhère vraiment. De même regrettera-t-on que, mal exploités, certains personnages secondaires ( une des sœurs de la victime (Michelle Williams) mais surtout son amoureux (Chris Klein) ( entraînent le film dans une série d’événements et une clôture aux accents mélodramatiques décevants. Un premier opus qui, non dénué d’intérêt, aurait gagné à faire un peu plus dans la nuance.
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