Madame Brouette : Portrait de femmes
Cinéma

Madame Brouette : Portrait de femmes

Accompagnée de sa petite fille Ndèye (magnifique Ndèye Sénéba Seck), Mati (Rokhaya Niang), jeune femme divorcée, pousse une brouette remplie de fruits dans les rues de Dakar. Au fil des jours, elle récolte ainsi une modeste somme d’argent lui permettant d’aider ses parents et de réaliser son rêve: ouvrir une petite gargote avec son amie Ndaxté (Kadiatou Sy) qu’elle a sauvée des griffes d’un mari violent. Mais au hasard d’une rencontre, notre jolie défenseuse de la liberté féminine s’amourache d’un policier crapuleux (Aboubacar Sadikh Bâ), et se fait à son tour entraîner dans une relation difficile.

S’articulant autour d’une structure en flash-back, cette coproduction Canada-Sénégal-France, à laquelle ont notamment contribué Rock Demers et Danielle Champoux, est un chant à la force de vivre, une ode à la complicité féminine. "J’ai voulu creuser la nature de l’amour, savoir pourquoi certaines personnes restent 30 ans ensemble et d’autres, deux mois, et pourquoi certaines femmes décident qu’à 35 ans, elles ne veulent plus rien savoir des hommes! Je voulais faire un portrait de ces femmes…" explique le réalisateur Moussa Sene Absa (Ça twiste à Poponguine, Tableau ferraille…) dans le dossier de presse du film. Ces femmes, il les représente comme fortes, déterminées, se battant contre une société ne les reconnaissant pas toujours à leur juste valeur. Répudiant sa fille parce qu’elle est enceinte, le père de Mati affirme avec conviction: "La vie de couple, c’est comme la langue et les dents. Quand les dents mordent, la langue ne s’en va pas pour autant." Les dents étant, bien entendu, de nature masculine… Or, c’est justement à cette vision patriarcale que s’oppose le cinéaste Moussa Sene Absa – aussi peintre, écrivain et musicien – en soulevant un certain nombre de questions quant aux clivages existant entre les générations, les sexes, la modernité et les traditions.

Bien que couronnée de prix (Ours d’argent pour la meilleure musique au Festival international du film de Berlin, 3e Prix du jury international au Festival du cinéma africain de Milan, Prix spécial du jury au Festival international du film de Paris, Prix du public aux Festivals d’Angers et de Brasilia…), cette chronique de la réalité sociale sénégalaise fait preuve de maladresses. Les dialogues apparaissent trop récités par les acteurs. De même certaines scènes tombent-elles dans le kitsch de mise en scène – on pense notamment à la nuit amoureuse – tandis que le montage se fait parfois brusque. Rien qui vienne pour autant gâcher complètement notre expérience du film. On se laisse en effet charmer par la vivacité de cette tragicomédie toute de jaune et de bleu, ponctuée de magnifiques chants griots. Un rayon de soleil sympathique et sans prétention.

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