Bénie sois-tu, prison : Profession de foi
Cinéma

Bénie sois-tu, prison : Profession de foi

En 1949, sous Staline, Nicole Valery-Grossu (magnifique Maria Ploae), intellectuelle aux idées libérales, est écrouée en prison par la police secrète roumaine. À l’instar de Costa-Gavras avec L’Aveu, Nicolae Margineanu (prix de la Meilleure contribution artistique et Mention spéciale – Prix œcuménique au dernier FFM) rend compte sans complaisance, tout en gardant une certaine pudeur, de l’humiliation et de l’injustice auxquelles la prisonnière doit se soumettre. Chaque nuit, on l’interroge et la torture pour lui soutirer, en vain, les noms des sympathisants du Parti démocratique. Ces scènes, par moments insoutenables, non seulement dénoncent les horreurs des guerres passées, mais elles évoquent également les cruautés que subissent encore de nos jours les prisonniers politiques partout à travers le monde – pensons notamment au sort réservé aux Irakiens par les soldats américains.

Tout comme pour l’écrivain soviétique Soljenitsyne, emprisonné de 1945 à 1953 et dont l’œuvre inspira à Nicole Valery-Grossu le titre de son récit autobiographique, cette expérience éprouvante, que plus de un million de dissidents auront vécue dans les camps roumains, deviendra pour la jeune femme la plus enrichissante de son existence. De fait, dans la cellule 24 de la Malmaison, à Bucarest, Nicole retrouve la foi grâce à un passage de la Bible qu’un ancien détenu a gravé sur l’un des murs. Transférée à la prison de Gilava, d’où elle ne sortira que quatre ans plus tard, cette Jeanne d’Arc moderne – les nombreux gros plans du visage transfiguré par la foi de Ploae renvoient à ceux de Falconetti chez Dreyer – fait figure de mère courage auprès des détenues par sa foi inébranlable. Modèle de force et de vertu, elle aidera ses camarades à tenir bon lorsqu’elles auront à travailler au chantier de construction du canal devant relier le Danube à la mer Noire.

Tourné sur les lieux mêmes où s’est joué le vrai drame, Bénie sois-tu, prison (en version originale roumaine avec sous-titres français) comporte des passages émouvants démontrant avec éloquence la solidarité et la tendresse qui animent ces femmes s’accrochant à l’idée que la Roumanie sera libre un jour. Contrastant avec toute cette humanité, la photographie aux couleurs délavées et l’austérité de l’ensemble traduisent la froideur d’un monde sans pitié. Une démonstration tout à fait convaincante de la force de la foi, peu importent nos propres croyances.

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