Rencontres à Cannes : Brèves rencontres à Cannes
Cinéma

Rencontres à Cannes : Brèves rencontres à Cannes

Brèves rencontres à Cannes

Alors que les starlettes font des pirouettes sur la Croisette, les intermittents distribuent leur journal, Interluttants. Afin d’en savoir davantage sur leur situation, on bavarde tranquillement avec eux jusqu’à ce que les gendarmes décident qu’ils en ont assez de les voir traîner dans les parages. Et hop! les trouble-fêtes au poste! Ouf! Il s’en fallait de peu pour qu’on soit forcé de les suivre. Tandis qu’ils crient, lors de leur manif du samedi: «Sans intermittents, pas de spectacles vivants», une bourgeoise outrée s’exclame: «Allez, on s’en fout de leur culture!» Et le cinéma, pauvre conne? Pas facile, la vie à Cannes: quand ce n’est pas la limousine d’Eddie Murphy qui manque de nous faucher, on manque d’être piétinée par des journalistes en furie qui dépassent tout le monde, de peur de rater une projection de presse. Faute d’avoir la bonne couleur de badge, on se bute le nez à la porte des conférences de presse. On se console en restant devant un moniteur qui diffuse le tout en direct. Et en s’attardant à la sortie, on échange un sourire avec Almodovar et l’on distingue en un éclair la chevelure blonde d’Emmanuelle Béart ainsi que le menton en croissant de lune de Tarantino. À la recherche de compatriotes au pavillon du Québec, on croise Mathieu Kassovitz qui semble avoir aimé La Grande Séduction; au Marché du film, Jean-Marc Barr paraît perdu dans ses pensées: vient-il de trouver une idée pour son prochain film? Heureusement, on peut se la couler douce sur une terrasse ensoleillée avec vue imprenable sur la ville en compagnie de l’impassible Abbas Kiarostami. Venu présenter 10 on Ten, dans lequel il explique sa démarche artistique, et Five, film expérimental nous permettant de renouer avec la simplicité du cinéma des origines, le grand cinéaste iranien avoue candidement qu’il ne s’attend pas à ce que les jeunes réalisateurs suivent ses traces, le modèle américain étant plus attirant. Il est triste et enrageant de penser que ses films sont interdits par les autorités iraniennes, qui préfèrent encourager le cinéma américain. Puis l’on se rend sur le bord de la piscine d’un chic hôtel pour recueillir les confidences du très prometteur réalisateur Yang Chao, qui souhaite que les intellectuels de son pays acceptent la lenteur de son film dénonçant le désarroi de la jeunesse chinoise. Un peu plus tard, toujours dans un somptueux hôtel – il n’y a que ça à Cannes -, on assiste à une table ronde avec Agnès Jaoui; cette dernière s’avoue étonnée lorsqu’on lui confie avoir trouvé son regard plus conciliant envers ses semblables, malgré la noirceur du récit. Vient le tour de Marilou Berry et de Jean-Pierre Bacri, qui en profitent pour s’allumer un pétard, avant de confier, la première, que les cons ont servi à faire d’elle un meilleur être humain; le second, que sa morale l’empêche de profiter du pouvoir que lui donnerait le vedettariat. Voilà qui est réconfortant à entendre au milieu de toute cette frénésie.