I'm Not Scared (Io non ho paura) : Jeux interdits
Cinéma

I’m Not Scared (Io non ho paura) : Jeux interdits

Dès les premières images d’I’m Not Scared (Io non ho paura), GABRIELE SALVATORES (Mediterraneo, Sud) nous entraîne dans un univers lumineux où le temps s’est arrêté, un monde champêtre où l’homme vit en communion avec la nature. Mais derrière cette vision bucolique à saveur nostalgique, l’horreur se tait sournoisement.

Sous un soleil de plomb, des enfants courent à perdre haleine dans des champs de blé qui s’étendent à perte de vue. Arrivés à proximité d’une masure, les garçons veulent forcer une fillette à s’humilier devant eux sous prétexte qu’elle a perdu la course; sachant qu’il est le réel perdant, Michele (Giuseppe Cristiano, admirablement dirigé) décide de prendre la place de sa camarade. L’épreuve à laquelle les gamins le soumettent se révèle bien innocente en comparaison des jeux dangereux auxquels le sensible Michele se livrera.

De fait, dans ce contexte pastoral où les parents aimants semblent irréprochables, la cruauté des enfants n’est qu’un faible écho de l’effroyable vérité qui fera bientôt surface. Ainsi, en retournant à la maison abandonnée, Michele découvre, terré dans un trou, un garçon de son âge mutilé, enchaîné et affamé. Plus tard, il apprend que tous les adultes du village, en apparence sans histoire, ont participé à l’enlèvement de Filippo (touchant Mattia Di Pierro). Défiant l’autorité parentale, Michele tentera de sauver le pauvre garçon victime d’un acte qui demeurera inexpliqué.

Reposant sur une intrigue peu étoffée, I’m Not Scared s’avère fort d’un symbolisme morbide. Aussi, la lenteur avec laquelle le réalisateur raconte ce dur récit d’apprentissage renforce le climat oppressant qui s’installe graduellement, de même que le sentiment d’impuissance qui envahit les protagonistes, tous deux prisonniers de leur jeune âge et livrés sans merci à un monde sans pitié. Une fois le secret révélé au grand jour, la nature, parfait refuge des enfants, prend alors un visage hostile: sous un ciel bleu assombri par des oiseaux de proie, les champs de blé que l’on rase présentent au soleil un sol aride grouillant de reptiles. Ayant fui dans l’imaginaire jusqu’à sa rencontre avec Michele, qu’il appelle son ange gardien, le petit Filippo ouvre péniblement ses yeux blessés; autrefois caressants, les rayons du soleil lui exposent la douloureuse réalité. Une œuvre d’une grande beauté formelle sur la perte de l’innocence.

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