De-Lovely : Biographie en mode mineur
Cinéma

De-Lovely : Biographie en mode mineur

Let’s Misbehave

, Ev’ry Time We Say Goodbye, Let’s Do It, Let’s Fall in Love… la liste des chansons de Cole Porter (1891-1964) en comporte plus de 300, lesquelles ont été reprises des centaines de fois depuis leur création. Des chansons aussi légères et irrésistibles que des bulles de champagne. Des chansons qui parlent d’amour tantôt avec fantaisie, tantôt avec nostalgie. Plus encore, des chansons qui traversent les époques sans prendre une ride, car d’Ethel Merman à Marilyn Monroe, en passant par Tom Waits et Annie Lennox, de multiples artistes ont su s’approprier cet irrésistible répertoire en y prêtant leur style, tout en respectant l’essence du prolifique auteur-compositeur américain. Souhaitant le faire découvrir à une nouvelle génération de mélomanes, Irwin Winkler retrace la vie et l’œuvre de Cole Porter (Kevin Kline) en mettant l’accent sur son long mariage d’amour et de raison avec Linda Lee (Ashley Judd), exquise muse qui décida d’accepter l’homosexualité de l’homme de sa vie afin d’en promouvoir le génie.

Porté par une trentaine de numéros musicaux (interprétés pour la plupart par des artistes de la scène pop et rock), De-Lovely se révèle un croisement plus ou moins satisfaisant entre le drame biographique et la comédie musicale. Deux genres qui peuvent sombrer, le premier, dans l’anecdotique, le second, dans le clinquant. Or, si l’ensemble effleure le piège de l’un, il évite l’autre de justesse grâce à une direction artistique impeccable – les amateurs de haute couture reconnaîtront la griffe sophistiquée d’Armani qui signe les costumes du couple mythique. Cependant, malgré sa finesse et son élégance, De-Lovely devient rapidement lourd et artificiel. Le coup de l’artiste mourant qui voit sa vie passer sous ses yeux, on nous l’a fait plus d’une fois et certains, tel Raoul Ruiz pour Le Temps retrouvé de Proust, avec drôlement plus d’originalité. Un soupçon d’extravagance à la Chicago ou de baroque à la Moulin Rouge aurait-il convenu davantage à la personnalité flamboyante de Porter? Demeure la sincérité des interprètes. Malgré une voix laissant à désirer, Kevin Kline possède tout le raffinement nécessaire à son personnage, alors qu’Ashley Judd, qui démontre pour la première fois ses talents de chanteuse, est l’incarnation parfaite de la grâce; parmi les prestations musicales les plus remarquables, mentionnons celles d’Elvis Costello, d’Alanis Morissette et de Natalie Cole.

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