A Home at the End of the World : Amour libre
Cinéma

A Home at the End of the World : Amour libre

Alors que l’adaptation de The Hours avait été confiée à David Hare pour le sublime film de Stephen Daldry, MICHAEL CUNNINGHAM tente maintenant sa chance comme scénariste en portant à l’écran son roman A Home at the End of the World, que met en scène le nouveau venu MICHAEL MAYER. Une première expérience qui se révèle quelque peu décevante dans les deux cas.

Ayant perdu un à un tous les membres de sa famille au cours des années 1970, le jeune Bobby Morrow trouve refuge dans la famille de son meilleur ami Jonathan Glover, avec qui il connaît ses premières expériences sexuelles, sous le regard bienveillant de la mère (Sissy Spacek). Les années passent. Las de Cleveland, Bobby (Colin Farrell) retrouve Jonathan (Dallas Roberts) à New York où il partage un appartement avec Clare (Robin Wright Penn). Bien qu’homosexuel et amoureux de son ami d’enfance, Jonathan projette de fonder une famille avec la jeune femme, qui s’éprendra de Bobby, sensible aux charmes des deux colocataires. Tous trois décideront alors d’acheter une maison à la campagne pour vivre leur amour… toujours avec la bénédiction de madame Glover.

Misant sur une trame sonore expressive pour bien marquer chaque époque – quand ce n’est pas sur les crimes contre l’esthétisme ayant marqué chaque décennie, plus particulièrement celle des années 1980 -, Michael Mayer rend compte avec pudeur de l’éveil sexuel des adolescents, du désarroi des mères et de la tendresse maladroite que se témoignent les amants. Bien que l’émotion soit souvent au rendez-vous, force est de constater qu’A Home at the End of the World s’apparente cependant à un feuilleton anecdotique.

De fait, contrairement au roman de Michael Cunningham, où l’on présentait le point de vue des quatre personnages, le film de Mayer raconte de façon platement linéaire ce récit qui s’étend de la fin des années 1960 au début des années 1980. Triangle amoureux peu banal, ce ménage à trois finira pourtant par paraître bien ordinaire tant les personnages demeureront creux et leurs intentions sommairement exposées. Comment le romancier, qui exploite ici des thèmes qui lui sont chers, tels que les zones grises de la sexualité, a-t-il pu perdre en cours de route toute la richesse psychologique qui fait la force de ses œuvres?

À défaut de pouvoir savourer des personnages substantiels, l’on se délectera avec bonheur du jeu des acteurs. Se révélant sans doute la plus grande surprise du film, Colin Farrell, le "bad boy" irlandais trop souvent confiné aux rôles on ne peut plus virils, incarne Bobby, un être ambigu en quête d’amour et incapable de vivre seul, avec une sensibilité qu’il n’avait pas démontrée depuis Tigerland de Joel Schumacher. En chapelière excentrique qui change de look comme d’humeur, Robin Wright Penn n’a jamais été aussi juste. Encore peu connu, Dallas Roberts s’en tire plutôt bien en évitant de jouer la caricature de la grande folle. Pour sa part, Sissy Spacek, dont le personnage de femme peu comblée par la maternité rappelle celui de Julianne Moore dans The Hours, s’avère tout simplement éblouissante.

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