When will I be loved : Torpeur et ronflements
When I will be loved de James Toback: détendez-vous, fermez les yeux et somnolez en toute quiétude. Vous ne manquerez absolument rien.
Ah, qu’il est aisé de réaliser une œuvre cinématographique! Il suffit de faire défiler incessamment un flot de paroles insipides pour camoufler l’absence d’idées, d’engager le mythique mangeur d’oreilles Myke Tyson pour faire une brève apparition à l’écran, de convaincre l’illustre Glenn Gould de figurer sur la trame sonore aux côtés d’étoiles montantes du hip-hop, de donner un caractère esthétique à quelques scènes de nu et voilà, le tour est joué! On peut désormais apposer sans crainte notre nom sous les mots: "un film de". (Attention! Ce processus est loin d’être une garantie de réussite et quiconque en suit religieusement les étapes peut se retrouver avec un flop monumental entre les mains.)
Il faut croire que James Toback (Black and White) n’avait guère porté attention au post-scriptum tout juste mentionné lors du tournage de When I will be loved. Mais la prétention qui irradie de ce long métrage est telle qu’il n’en aurait probablement strictement rien eu à cirer. Le communiqué de presse annonce un travail scintillant, hip et post-féministe. L’écran, quant à lui, projette un produit d’un ennui et d’une fatuité difficilement égalables. Souhaitant visiblement toucher un public adolescent tout en ayant l’air de s’adresser à la crème de l’élite intellectuelle, Toback mêle allègrement refrains rap, considérations existentialistes et discours dénués de profondeur dans la bouche d’êtres qui semblent perpétuellement avoir un paquet entier de gommes coincé en travers de la luette. Le titre de saboteur émérite de l’art oratoire revient néanmoins à l’intolérable Frederick Weller pour son incarnation d’un souteneur mesquin qui offre sa petite amie (Neve Campbell, dans le classique rôle de la perverse angélique) en pâture à un comte italien (Dominic Chianese, sous les traits d’un multimillionnaire vicieux). À entendre les propos aussi intelligibles qu’insignifiants débités par ce trio gagnant, les spectateurs se surprendront à espérer qu’un revirement de situation entraîne brusquement les personnages sur la voie du mysticisme religieux, les condamnant ainsi à faire vœu de silence éternel. Un film dont on ressort convaincu de l’importance de bannir à tout jamais le dicton "une image vaut mille mots".
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