Silver City : La face cachée de la une
Silver City de John Sales: conflits d’intérêts, jeux de pouvoir et publicité mensongère. En bref: la démocratie américaine à son meilleur.
C’est bien connu: un parfum de scandale possède un effluve beaucoup plus doux que celui qui émane d’un acte de vertu. Les démonstrations d’honneur et d’héroïsme n’intéressent qu’en surface; ce que le peuple veut, c’est de la machination, des manigances et de la corruption. Lui offrir un savoureux alliage des trois, c’est garantir une ascension fulgurante à sa cote de popularité lors des prochains sondages. Bush l’a fait. Résultat: malgré les manifs, les pétitions et les boycotts, le président le plus contesté de l’histoire des États-Unis est en passe de se voir confier un second mandat. Qui plus est, fiston George ne cesse d’inspirer les scénaristes pour qui sa personne honnie et sa politique douteuse constituent une véritable mine d’or. Le tout nouveau portrait critique dont son double est le héros porte la signature de John Sayles (Casa de Los Babys), et il est loin d’y faire figure de génie.
En pleine campagne (au sens propre et figuré du terme), l’aspirant gouverneur Dickie Pilager (parfait Chris Cooper) tourne un spot promotionnel dans lequel, canne de pêche à la main, il atteste son amour invétéré pour la nature et sa sincère préoccupation pour l’environnement. Petit hic: plutôt que de prendre la forme d’une typique bête à nageoires, le poisson qui mord à l’hameçon prend celle d’un cadavre. S’ensuivront inévitablement panique, consternation et enquête.
Avec des dialogues habiles qui ne manquent pas d’esprit et une gamme de personnages bigarrés, Silver City se révèle une satire politique certes efficace, mais aussi décevante en raison de son manque d’audace. Les références au pouvoir américain sont indéniables. Pourquoi alors, une fois ce premier pas franchi, le cinéaste n’en a-t-il pas profité pour pousser l’attaque à son maximum? Aurait-il eu peur que cette censure qui accable les reporters, investigateurs et autres protagonistes de son long métrage ne lui impose à son tour sa loi? Pilager proclame que tout cela ne revient qu’à un seul mot: liberté. Et si c’était justement de son manque qu’il était ici question? Une chose est sûre: le grand écran n’en a pas fini avec Bush, et on ne peut faire autrement que de s’en réjouir. God bless le cinéma!
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