Festival du nouveau cinéma : Parcours succinct
Le Festival du nouveau cinéma de Montréal surprend par une programmation tempérée et quelques salles à demi remplies.
Le parcours d’un festivalier est composé de coups de cœur, de surprises et de déceptions. On ne saurait honnêtement rendre compte de ce parcours en négligeant l’ivraie au profit du bon grain. Laissons donc à certains le loisir de dissimuler leur désappointement et à d’autres la fièvre d’une utopique ubiquité pour sincèrement exprimer une critique dénuée d’attentes et libérée de considérations publicitaires.
Du côté des films, quelques curiosités côtoient l’ordinaire. Calvaire de Fabrice du Welz incarne les deux à la fois. L’avertissement servi avant la projection laissait pourtant deviner un film dérangeant et déstabilisant. Or, des scènes de crucifixion et de zoophilie peuvent-elle encore déranger et déstabiliser un spectateur plus de 30 ans après Pasolini? Certes, il y aura toujours de puérils esprits pour s’exciter les neurones devant une violence dénuée d’idées. Par chance, il y a toujours un Raoul Ruiz pour nous rappeler que le sang, la violence et la mort au cinéma relèvent avant tout du jeu. Une place parmi les vivants, du réalisateur chilien, étend le ludisme ruizien jusqu’au genre ultra-codifié du film noir. Malgré quelques longueurs tout excusées, ce film témoigne à nouveau du plaisir qu’a le réalisateur d’interroger et de distordre le langage cinématographique.
Le Québécois Simon Sauvé propose quant à lui JimmyWork; l’histoire de Jimmy, un pauvre type souhaitant quitter une vie de misère en se faisant passer pour un producteur américain. Suivant de près les pérégrinations fictives de son personnage, Sauvé adopte un point de vue documentaire et un style volontairement maladroit qui transforme le récit de Jimmy en véritable portrait désenchanté de la médiocrité humaine. Surprenant. Mais si la médiocrité est ici fiction, elle est réelle dans À l’ouest des rails de Wang Bing. Le cinéaste promène habilement sa caméra dans la Chine des usines décrépites et des ouvriers désillusionnés pour nous faire découvrir les restes poussiéreux et rouillés du rêve industriel chinois. Un documentaire saisissant, important et renversant, présenté en quatre parties de plus de deux heures chacune, lesquelles, soulignons-le, peuvent être vues indépendamment.
D’autres excellents documentaires présentés dans le cadre du Festival sont également à souligner. Notamment, A History of Sex de Michael Coulter. Ce film dérange peut-être par la froideur clinique avec laquelle est montrée la démarche artistique et urineuse du photographe Andres Serrano, il n’en demeure pas moins une intéressante incursion dans l’univers déjanté de la libre expression. Mais si le documentaire de Coulter laisse les images parler d’elles-mêmes, on ne peut en dire autant de Superstar in a Housedress de Craig Highberger, un documentaire sur la vie de Jackie Curtis dans lequel les nombreux témoignages, parfois hilarants, souvent superficiels, nous en apprennent trop peu du personnage. Un film mineur pour un travesti plus grand que nature. La lubie du témoignage atteint un sommet avec Uncovered: The War on Iraq de Robert Greenwald. Avons-nous réellement besoin de l’avis d’une vingtaine d’experts pour comprendre que George W. est un idiot doublé d’un menteur? Néanmoins, loin de nous l’idée de remettre en question la démarche, puisqu’il suffit peut-être, comme Bush l’a démontré, de répéter encore et encore les mêmes arguments pour convaincre… Jusqu’au 24 octobre.
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