Alexandre : Il était une fois dans l'est
Cinéma

Alexandre : Il était une fois dans l’est

Avec Alexandre, Oliver Stone livre une vision personnelle de l’Histoire, où l’homme et le mythe ne font qu’un. Tragédie  grecque.

En 283 av. J.-C., à Alexandrie, Ptolémée (Anthony Hopkins), roi d’Égypte et ancien général d’Alexandre le Grand (Colin Farrell), dicte l’histoire du conquérant à un scribe afin qu’elle passe à la postérité. C’est ainsi qu’on remonte jusqu’à l’enfance du futur roi de Macédoine, pour découvrir la relation quasi incestueuse qui le lie à sa mère, Olympias (Angelina Jolie), que d’aucuns qualifient de sorcière et qui, toujours entourée de serpents, est dépeinte comme le démon à l’origine de son ambition. Les rapports haineux entre elle et Philippe (Val Kilmer), son mari, qui ne croit pas être le père du garçon, ne sont pas non plus sans l’influencer, alors qu’il se voit traité, tantôt en fils, tantôt en bâtard. Puis, après un aperçu de son éducation auprès d’Aristote et le meurtre de son père, on suit le guerrier à travers la Perse, où il épouse Roxanne (Rosario Dawson), une indigène, et jusqu’en Inde, où ses décisions sont de plus en plus contestées. Enfin, de retour à Babylone après une bataille particulièrement sanglante, il assiste au décès de son grand amour Hephaistion (Jared Leto), avant de mourir à son tour à l’âge de 33 ans.

Comme on pouvait s’y attendre, Oliver Stone y va d’une lecture subjective de l’Histoire, alors qu’il imprègne ses personnages de motivations contemporaines et donne aux événements des échos familiers, tout en soignant le réalisme brut d’une reconstitution dénotant un véritable souci du détail, sans pour autant s’empêcher de plonger à fond dans le mythe. Ainsi, après une introduction plutôt didactique qui en découragera certains, il privilégie d’abord la confrontation entre les protagonistes, à travers un jeu appuyé, et l’exploration de la psychologie du héros, voire sa psychanalyse. Mais cela, dans un esprit de démesure se rapprochant de celui de la tragédie, alors que ce dernier atteint des dimensions mythiques et se compare tour à tour à Hercule, à Achille, à Prométhée et à Odipe. Quoi qu’il en soit, l’œuvre tend à créer une impression de proximité et mise sur le côté humain de la politique. À ce chapitre, les scènes faisant état des dissensions internes au sein de l’armée apparaissent particulièrement intéressantes, alors qu’Alexandre s’y affirme comme un exalté, aux ambitions et à l’orgueil titanesques.

Toutefois, à trop vouloir souligner la grandeur du personnage, Stone pèche parfois par excès de procédés emphatiques un peu faciles. De même, il est dommage que la relation entre Alexandre et Hephaistion soit empreinte d’un sentimentalisme sirupeux qui la rend grotesque. N’empêche, le pathos sert bien les scènes de bataille qui, par leur côté frénétique et "capté sur le vif", s’avèrent intenses et efficaces. Quant au discours patriotique, on ne peut l’ignorer, alors que le parallèle avec l’empire américain apparaît pour le moins évident. Qu’on pense seulement à l’aigle survolant la bataille contre les troupes de Darius (qui se réfugie dans des cavernes…). Ou encore, au propos d’Alexandre, qui veut notamment libérer les peuples du monde. Bref, un regard sur le passé bien enraciné dans le présent.

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