FIFA : Les mots pour le dire
Cinéma

FIFA : Les mots pour le dire

La 23e édition du Festival international du film sur l’art prend son envol ce jeudi. Outre une programmation susceptible de rejoindre les amoureux des arts, le FIFA présente en primeur neuf films québécois. Bref survol.

Dans ce riche panorama du FIFA, les arts visuels sont bien représentés. Il faudra, bien sûr, éviter les quelques tartines habituelles sur le surréalisme (qui a encore la cote dans l’imaginaire collectif) expliqué pour la énième fois dans un film ennuyeux (et en compétition!) sur le génie de Dali (encore lui!!), dans The Dali Dimension, ou dans un autre encore plus endormant sur Roberto Matta (Matta: The Eye of a Surrealist). Voici donc un choix.

Mais avant, permettons-nous de souligner l’absence de films sur les artistes contemporains d’ici, absence qui n’est pas due à la sélection du FIFA mais au manque d’intérêt des cinéastes. Personne dans le milieu du cinéma qui soit intéressé à faire découvrir et comprendre nos jeunes (et moins jeunes) artistes? Faut-il qu’un créateur soit vieux, mourant ou, encore mieux, mort pour que l’on veuille tenter de comprendre sa démarche?

GUIDO MOLINARI

Puisque nous parlons de la fascination pour l’artiste mort, commençons par ces trois hommages au peintre Guido Molinari, décédé en février 2004.

Le film La Dernière Conversation a été réalisé par la dernière femme de Molinari, rencontrée en 2001. Jocelyne Légaré, riche héritière et directrice des pompes funèbres Alfred Dallaire, a accompagné Molinari jusqu’à son tombeau (il y a des histoires qui ne s’inventent pas). Et elle a filmé, jusqu’à plus soif, un Molinari extrêmement malade, ayant du mal à respirer. De nombreux artistes ont montré la mort en direct, tels l’écrivain Hervé Guibert et Wim Wenders (Nick’s Movie). Toutefois, force est d’avouer que ce film sur Molinari semble d’une grande violence. Même si devant la mort on ne veut pas être impuissant et qu’on veut faire quelque chose (l’acte de filmer peut être de cet ordre des choses), comme le dit Molinari à un certain moment à sa compagne: "Enough! Arrête ça, s’il vous plaît."

Plus historique est MolinariLa couleur chante de Lauraine André G. Elle y retrace la carrière du peintre, de ses années les plus fortes à ses dernières créations assez faibles, telle l’œuvre pour le magasin Simons ou celle sur Mallarmé (auquel Molinari se compare continuellement!) présentée chez René Blouin et qui reprend une idée de Marcel Broodthaers.

Et puis, il y aura aussi à voir The Colour of Memory: Conversations With Guido Molinari de Donald Winkler et Nicola Zavaglia.

ART QUÉBÉCOIS

En termes d’art québécois, deux autres réalisations valent votre présence.

La première porte sur Serge Lemoyne (1941-1998), artiste rebelle (qualificatif respectueux s’il en est un), celui qui a fait les premiers happenings au Québec. Cet enfant rebelle de l’art québécois a produit une œuvre très inégale, mais où plusieurs moments très forts ont marqué notre histoire de l’art. Le film Lemoyne vous fera suivre les hauts et les bas de sa carrière et de son moral.

La seconde porte sur Alfred Pellan (1906-1988). Dans Pellan… La femme désirée, Pierre Houle (qui a réalisé Monica la mitraille et des séries télé extraordinaires comme Bunker, le cirque et Omertà) tentera de montrer l’importance de cet artiste souvent méprisé au profit de Borduas, son contemporain et "ennemi artistique".

VIDÉO D’ART

La section de vidéo d’art inaugurée en 2001 se poursuit cette année. Trois volets la composent.

Premièrement, la commissaire Nicole Gingras a choisi d’y rendre hommage à Tom Sherman, vidéaste, performeur, cofondateur de Fuse Magazine, artiste ayant représenté le Canada à la Biennale de Venise en 1980. À ne pas rater.

En second lieu, nous pourrons voir une rétrospective des réalisations du collectif de femmes le Groupe intervention vidéo (GIV), qui fête ses 30 ans d’existence.

Et puis nous pourrons voir les plus récents développements de ce médium avec une sélection d’une dizaine de réalisations de Paul Landon, Mario Côté, Daniel Cockburn

PHOTOGRAPHIE

C’est une des photographes les plus importantes à l’heure actuelle. Et la Néerlandaise Rineka Dijkstra fait l’objet d’un film qui est en compétition. C’est le chevronné réalisateur français Jean-Pierre Krief qui a élaboré ce Contacts: Rineka Dijkstra. Krief présente deux autres films sur la photo dans ce festival, un premier sur Wolfgang Tillmans et un second sur Roni Horn.

Il ne faudra pas non plus rater le film sur Robert Frank (Leaving Home, Coming Home) qui, à l’âge de 80 ans, a accepté de parler de son travail. À surveiller aussi, un petit film sur l’une des pionnières de la photo canadienne, The Multiple Selves of Hannah Maynard.

ART CONTEMPORAIN

L’art contemporain chinois a la cote depuis une dizaine d’années. Deux films de Lana Jokel, Chinese Contemporary Art – Artists Working in China et Chinese Contemporary Art Comes to America, permettront d’en apprendre plus sur le sujet.

Les Young British Artists (YBA), avec leurs quelques bons et surtout leurs mauvais créateurs, continuent de faire parler d’eux. Deux films traitent de cette mouvance: celui sur la photographe à la mode Sam Taylor-Wood et celui sur le "marionnettiste" et collectionneur de ces artistes, le très riche Charles Saatchi (The Saatchi Phenomenon de Vanessa Engle). Toujours côté art contemporain, il faudra aller voir le film sur Panamarenko (Panamarenko, la magie de l’art).

HISTOIRE DE L’ART

Le film en compétition Dutch Light (de Pieter-Rim de Kroon) est absolument à voir. Les prémisses sont étonnantes (la disparition de la lumière hollandaise à la suite de l’assèchement de la mer intérieure des Pays-Bas) et la suite du film, tout aussi intrigante.

À voir aussi, toujours en compétition, le film Napoléon, DavidLe Sacre de l’image, un film de Patric Jean sur le célèbre tableau Le Sacre, peint il y a 200 ans. Ce film sera présenté en ouverture du festival.

ARCHITECTURE

Le film sur Moshe Safdie est particulièrement ennuyeux (malgré l’importance du travail de cet architecte), il faudra plutôt aller voir Tall: The American Skyscraper and Louis Sullivan ou bien Heavenly Mud sur l’architecture africaine traditionnelle.

BEAUTÉ

Signalons aussi une curiosité. La féministe australienne Germaine Greer a écrit en 2003 un joli essai (scandaleux pour certains) sur la beauté des jeunes hommes. Matt Cain en donne une version filmique (Germaine Greer: The Boy).

Du 10 au 20 mars
www.artfifa.com