Seven Times Lucky : Winnipeg Blues
Seven Times Lucky, premier long métrage du Montréalais Gary B. Yates, nous transporte dans une Winnipeg qui se prend pour Chicago. Entrevue avec le réalisateur et l’actrice Liane Balaban.
Feutre à la Bogart vissé sur le crâne, Gary B. Yates trahit par son allure vestimentaire un faible pour le film noir: "Je puise mon inspiration dans le cinéma des années 1940, mais aussi dans le cinéma plus contemporain. Dans Seven Times Lucky, on se croit par moments dans les années 1940, puis dans les années 1970, 1990, etc. Ce qui m’a plus lorsque j’ai vu Blue Velvet de David Lynch, c’est que l’on croit d’abord que l’action se passe dans les années 1950; or, par la musique et le style des personnages, on se rend compte que l’action se déroule à une toute autre époque. Mais en fait, mes influences sont plus littéraires que cinématographiques; en écrivant le scénario, j’avais en tête des romans policiers comme ceux d’Elmore Leonard et de Raymond Chandler."
"Je ne connaissais pas vraiment le film noir, je me suis donc référée à mon voisin qui possède une grande collection de ces films. J’ai vu entre autres Casablanca et je suis tombée amoureuse du look de l’époque, j’étais donc excitée à l’idée d’explorer ce genre. Grâce à Seven Times Lucky, c’est la première fois que je suis belle dans un film", d’avouer candidement la jolie Liane Balaban, actrice torontoise découverte dans New Waterford Girl d’Allan Moylle et vivant aujourd’hui à Montréal.
À quelques jours de Noël, Harlan (fort convaincant Kevin Pollack) doit rembourser à sa patronne Eddie (Babs Chula, savoureuse) une grosse somme d’argent qu’il a perdue aux courses. S’étant fait proposer par son partenaire Sonny (Jonas Chemick, quelque peu survolté) de revendre des montres en or, Harlan découvre bientôt que sa nouvelle complice Fiona (Liane Balaban, parfaite en ingénue fatale) n’est pas aussi fiable qu’elle le prétend.
Riche en rebondissements et en trahisons, Seven Times Lucky prouve hors de tout doute que le jeune cinéaste connaît les règles du film noir. Ce qui ne l’empêche toutefois pas de livrer un premier long métrage très personnel où Winnipeg n’aura jamais parue aussi glauque. S’amusant volontairement à brouiller les époques grâce à une direction artistique minutieuse, Yates ajoute une bonne charge d’ironie à l’ensemble en faisait jouer lors de moments plus dramatiques des chansons de Noël. De plus, il crée des personnages féminins très forts qui ne servent pas de faire-valoir aux hommes.
Un beau défi pour Balaban: "Fiona est amoureuse, on comprend donc ses motivations. Malgré les apparences, elle n’est pas si sans cœur que ça; lorsqu’elle trahit Harlan, elle se sent coupable, car elle sait qu’il est amoureux d’elle. Elle est intelligente et belle, mais elle n’est pas la potiche de service; on sent qu’elle a un passé lourd, mais ce qui m’a le plus touchée chez elle, c’est le grand amour qu’elle voue à Sonny. Pour moi, c’est une âme pure, même si elle est une voleuse." De poursuivre Yates: "Pour moi, Fiona est aussi amoureuse de Harlan; cela devient donc difficile pour elle de savoir si elle pose les bons gestes."
Au centre de ce film délicieusement sombre brille Kevin Pollack, acteur trop souvent relégué au second rang: "Dès le début, je voyais Kevin Pollack dans le rôle de Harlan, raconte Yates. Comme c’est un film à petit budget (2 millions) tourné à Winnipeg, j’étais surpris qu’il ait pris la peine de lire le script… Et pourtant, il m’a téléphoné pour me dire qu’il avait aimé le scénario. Kevin peut jouer le tueur psychopathe dans The Usual Suspects avec autant d’aisance que l’honnête avocat sympathique dans A Few Good Men. Pour moi, Kevin est un acteur qui possède un large éventail de jeu, mais qui est sous-utilisé."
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