L’Avis d’un fou : Il était un fou
L’Avis d’un fou, documentaire autobiographique de l’inénarrable François Gourd, retrace 30 ans de contre-culture au Québec. Rencontre avec un fou. Un vrai!
Depuis une trentaine d’années, il a été de tous les combats… ou presque. Candidat du regretté Parti Rhinocéros, entarteur du président d’Alliance Québec Bill Johnson un jour de Fête nationale, fondateur des Foufounes Électriques, du Festival de musiques incroyables de Saint-Fortunat et du Symfolium, François Gourd s’est fait remarquer dernièrement à la commission Gomery, sous le nom de Mom Coucher des Hells Zheimers, en brandissant une pancarte où l’on pouvait lire "Amnésie son cash".
Le 1er avril, ce maître ès calembours présentera son premier long métrage, L’Avis d’un fou, pour lequel il a farfouillé dans 70 heures d’archives personnelles afin de livrer en vrac 30 ans de folie créatrice et contagieuse. Tout un exploit de la part d’un homme qui se vante de pratiquer le "ici, maintenant" sous prétexte qu’il n’a ni mémoire ni avenir…
Outre le sympathique "humoritionnaire", tel que Gourd se définit, apparaissent dans ce tourbillon d’images, montées de façon anarchique à l’aide de Martin Leblanc, des fous toutes générations et nationalités confondues: Armand Vaillancourt, Guy Laliberté, Patch Adams, René Lussier, Les Abdigradationnistes, Mononc’ Serge, Noël Godin… Sans oublier Joe Binne et Elvis, charmantes stars canines de ce documentaire déjanté, qui nous accueillent avec allégresse dans le refuge de François Gourd, V.I.P. (véritable idiot professionnel): "À 17 ans, j’ai travaillé à Expo 67; c’est là que j’ai ouvert les yeux et que j’ai commencé à prendre de l’acide, à fumer du pot. On scandait We want the world and we want it now!". On tripait sur les portes de la perception, sur les Doors, Jimi Hendrix, les Beatles… Disons que tout ça, ça te change du chapelet que tu récites le dimanche soir à genoux…"
Bien qu’il ait connu une enfance normale (avec ses amis imaginaires!) durant la fin de la Grande Noirceur et les débuts de la Révolution tranquille, François Gourd avoue avoir toujours été fou: "C’est dommage que les gens aient perdu cette folie. Une chance qu’on a Les Bougon à la télé! Est-ce qu’on naît fou ou on le devient? s’interroge celui qui a fait ses études au Collège Notre-Dame et à Brébeuf. Je crois que les deux sont possibles." Pointant une bibliothèque où s’entassent des dizaines de livres, il poursuit: "Pour moi, la folie, c’est tout ça! Des fous qui font de la peinture, des fous du roi… L’Éloge de la folie d’Érasme… Rabelais… Dada, les surréalistes, la pataphysique, Breton, Cocteau, Artaud… Coluche… L’Anthologie de la subversion carabinée de Noël Godin…" Fou mais pas ignare.
De l’engagement politique aux grandes causes humanitaires, en passant par l’art sous toutes ses formes, Gourd a contribué à transformer le visage du Québec, mais n’allez pas lui dire qu’il est un monument pour autant, car le jeune quinquagénaire n’a jamais rien fait pour l’argent ni pour la gloire. Chaque fois, il était là au bon moment: "En 1976, on était une gang, dont Benoît Fauteux, qui s’est connue dans la rue. On a eu l’idée de créer une fanfare et on s’est mis à jouer dehors. À la fin de l’été, on était 35 et L’Enfant fort était né. La musique, le théâtre, le cirque ont alors explosé. Notre fanfare jouait dans toutes les manifs, puis en 1978, nous nous sommes joints au Parti Rhinocéros, qui existait depuis 1963. Il y avait une grosse mouvance contre-culturelle qui venait de la Californie, de New York, de la France; c’était une époque où l’on voulait changer le monde. Ensuite, j’ai fondé les Foufounes Électriques, il y a eu le "fuck the world" et l’humanité a réalisé qu’elle n’avait plus d’avenir."
De poursuivre celui qui promet de ne jamais s’assagir: "Aujourd’hui, je veux partir un mouvement pour l’élimination complète de l’humanité pour que la Terre ait la paix parce que nous sommes des parasites nuisibles pour elle." En attendant que ce projet de fou prenne forme, allez voir L’Avis d’un fou qui, malgré ses quelques longueurs et digressions pas toujours drôles, s’avère absolument irrésistible et hilarant. Un chapitre de l’histoire du Québec qu’on ne voudrait surtout pas oublier!
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La Pharmacie de l’espoir
À l’occasion de la sixième édition du Symfolium, où l’on rendra hommage à la masturbation (histoire d’en décoincer quelques-uns), aura lieu le dimanche 3 avril, au Lion d’Or, l’avant-première de La Pharmacie de l’espoir, dernier film de François Gourd. Tournée en 12 heures, sans budget, cette expérience cinématographique improvisée met en vedette 39 artistes, dont Claude Laroche, Pascale Bussières, Stéphane Crête, le sculpteur Armand Vaillancourt et le réalisateur André Melançon. 1676, rue Ontario Est, 598-0709. Admission: 20 $.