Le 58e Festival de Cannes : Sous le soleil exactement
Cinéma

Le 58e Festival de Cannes : Sous le soleil exactement

Le 58e Festival de Cannes, qui compte sur le retour en force de ses grands auteurs, s’annonce encore meilleur que l’an dernier. Pas difficile, diraient certains critiques…

À quelques heures de la soirée d’ouverture, où l’on allait présenter le très attendu Lemming de Dominik Moll, qui nous avait donné le jouissif Harry, un ami qui vous veut du bien, les Cannois grommelaient déjà du fait que leur ville ne leur appartenait plus. Ornées de bannières aux couleurs du célébrissime festival, les rues de Cannes sont envahies par les membres de la presse internationale et grouillent de taxis et de limousines. Malgré les projets du nouveau maire, qui a promis de faire tirer des billets de cinéma parmi ses citoyens, les Cannois savent bien que le festival ne leur est pas destiné… Alors que le monde entier a les yeux braqués sur Cannes, ces derniers devront se contenter d’apercevoir les stars, dont Scarlett Johansson (Match Point de ce bon vieux Woody Allen, qui sera aussi de la partie), le casting de Star Wars III (hors compétition) et celui de Sin City (en compétition) ainsi que le divin Gael García Bernal, en se juchant sur leur escabeau au pied des marches du Palais. On aura beau dire que nos festivals font figure de parent pauvre, au moins, tout le monde peut se joindre à la fête…

Les vieux routiers

Sin City de Roberto Rodriguez.

Quels films feront craquer Emir Kusturica, qui devient président du jury 20 ans après avoir mérité la Palme d’Or pour Papa est en voyage d’affaires? Sans doute aura-t-il un faible pour le film de Moll dans lequel un jeune couple (Charlotte Gainsbourg et Laurent Lucas) verra sa vie bien rangée basculer dans l’irrationnel à la suite de la découverte d’un lemming mort dans son évier. Sur une note plus dramatique, un autre couple (Viggo Mortensen et Maria Bello) voit sa vie bouleverser, ici par un hold-up, dans A History of Violence du Canadien David Cronenberg. Pour sa part, Atom Egoyan propose une histoire de meurtre commis dans une réception donnée par deux stars du showbiz (Kevin Bacon et Colin Firth) dans Where the Truth Lies. Quant à l’Autrichien Michael Haneke (La Pianiste), il nous convie avec Caché au drame d’un journaliste littéraire (Daniel Auteuil) filmé à son insu par un vidéaste fou.

La prestigieuse sélection officielle compte également L’Enfant des frères Dardenne, avec Jérémie Renier dans la peau d’un jeune homme léger qui doit assumer sa paternité – thème aussi exploré par Jim Jarmusch (Broken Flowers), Wim Wenders (Don’t Come Knocking) et Marco Tullio Giordana (Une fois que tu es né) -, Manderlay de Lars von Trier, suite de Dogville avec Bryce Dallas Howard, qui reprend le rôle de Nicole Kidman, ainsi que Last Days de Gus van Sant, mettant en vedette l’excellent jeune comédien Michael Pitt et s’inspirant de la vie de l’icône du mouvement grunge, Kurt Cobain. Le comédien américain Tommy Lee Jones viendra aussi présenter son premier essai derrière la caméra, The Three Burials of Melquiades Estrada.

L’honneur de clore le festival revient à Martha Fiennes, qui signe Chromophobia avec Penélope Cruz et Rhys Ifans. En tout, 21 films, soit deux de plus que l’an passé, qui tenteront de rafler les honneurs et de séduire les cinéphiles les plus exigeants – et à Cannes, ils sont parfois impitoyables… Vincent Gallo ne s’est toujours pas remis de l’échec de son narcissique road movie Brown Bunny.

Du côté du volet Un certain regard, dont le jury est présidé par Alexander Payne (l’irrésistible Sideways) (celui de la Caméra d’Or l’est par le grand cinéaste iranien Abbas Kiarostami), mentionnons Le Filmeur, film autobiographique d’Alain Cavalier, Le Temps qui reste de François Ozon, avec Melvil Poupaud et Jeanne Moreau, ainsi que le film d’ouverture, L’Arc de Kim Kiduk, qui ne sera certes pas le seul cinéaste asiatique au rendez-vous.

Invasions d’Asie

Il n’y a pas qu’à Fantasia que l’on apprécie les saveurs d’Orient; cette année, Cannes reçoit, en plus de Hou Hsiao Hsien (Three Times), les nouveaux venus Wang Xiaoshuai (Shangai Dreams) et Johnnie To (Election). Ces derniers feront-ils autant d’éclat qu’en avaient fait Oldboy de Park Chanwook ou Tropical Malady d’Apichatpong Weerasythakul l’an dernier? La barre est haute!

L’Amérique latine, qui nous avait donné le très beau La Nina santa de Lucrecia Martel, n’est pas en reste avec la présence de Carlos Reygadas (Batalla en el cielo) et de Juan Solanas (Nordeste). L’aventure se poursuit jusqu’au 22 mai… en même temps que la Quinzaine des réalisateurs et la Semaine de la critique. Et il y en a qui appellent ça des vacances!