Walk on Water : Cas de conscience
Cinéma

Walk on Water : Cas de conscience

Walk On Water se demande comment la jeunesse allemande assume l’héritage moral de ses grands-parents. La question est dans le vent.

Tout récemment, le monde soulignait pour la soixantième fois la fin de la Seconde Guerre mondiale et la libération des camps de concentration. Le temps passe, les acteurs ayant soufflé les toutes premières bougies de ce triste anniversaire s’éteignent, mais le devoir de mémoire demeure. Et comment le souvenir des actes posés par les aînés devrait-il se transmettre et s’assumer chez les plus jeunes?

Walk On Water pose l’hypothèse que, malgré la distance installée par le passage des années, le sentiment de honte qu’éprouve la jeunesse allemande demeure entier. Longtemps tu, il se manifesterait désormais de manière amplifiée, voire même virulente. C’est du moins l’idée véhiculée par le nouveau long métrage du réalisateur israélien Eytan Fox (son précédent, Yossi and Jagger, racontait l’idylle de deux soldats appartenant à l’armée israélienne).

Agent à l’emploi des services secrets israéliens, Eyal (Lior Ashkenazi) est chargé d’épingler un criminel de guerre allemand avant que le bon Dieu lui-même ne s’en charge. En se faisant passer pour un guide touristique, il réussit à "apprivoiser" le petit-fils du vieux nazi, Axel (Knut Berger), venu rendre visite à sa sœur, Pia (Carolina Peters), qui travaille dans un kibboutz. Fâchée avec sa famille, celle-ci a quitté la maison en apprenant que son papi vivait à couvert depuis des années, protégé par ses parents. En écoutant aux portes, Eyal apprend la nouvelle en même temps qu’Axel, dégoûté, lui qui ignorait tout. Peu de temps après cette révélation, le film se transporte en Allemagne, où Eyal tente d’achever sa mission. Il profitera d’une aide inattendue.

Revêtant les habits sombres et ajustés du thriller, Walk On Water n’aborde son questionnement fondamental que par la bande. Ou, plutôt, en fait la pièce clé d’un puzzle assez complexe. Le tiraillement moral d’Axel et de Pia s’inscrit dans un vaste programme ébauché par le réalisateur – peut-être un peu trop vaste, d’ailleurs, si bien qu’on a le sentiment de surfer, là où on aurait aimé plonger.

Par moments, le film s’intéresse surtout à mettre en contraste les positions morales antithétiques d’Eyal et Axel, dont les idées, les valeurs et les expériences se heurtent systématiquement. Ils deviendront quand même amis. Les deux hommes défendent avec adresse des rôles complexes, mais qui frisent la caricature. On a quand même apprécié le personnage d’Eyal, campé avec une bonne dose de détachement ironique par la star du petit écran Lior Ashkenazi. Créature macho limite "stéréotypique", Eyal souffre d’une insuffisance lacrymale et voue un culte à Bruce Springsteen. Voyez le genre.

Semant ses indices comme autant de miettes de pain, Walk On Water ramène, dans le dernier droit, le spectateur à sa préoccupation première. Si l’apparition du nazi grabataire réserve la même surprise qu’un lapin sortant d’un haut-de-forme élimé, la façon d’apprêter ledit lapin nous intéresse, elle, au plus haut point. Alors, ça sera à la broche ou la casserole? Dommage qu’un épilogue pétri de bons sentiments, comme servi en guise d’excuse, vienne édulcorer cette grave conclusion.

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