Idole instantanée : Idiotie incarnée
Cinéma

Idole instantanée : Idiotie incarnée

Idole instantanée, première réalisation d’Yves Desgagnés, livre un portrait caricatural de la télé-réalité en suivant quatre aspirantes chanteuses interprétées par Claudine Mercier.  Pitié!

L’été dernier, Pierre Falardeau s’attaquait à la convergence et à la télé-réalité en signant le merdique mais féroce Elvis Gratton III. Le message passait, mais le tout souffrait d’un trop-plein de gags burlesques. Cet été, c’est au tour d’Idole instantanée, écrit par Émile Gaudreault – qui avait déjà exploité le phénomène en coscénarisant le médiocre Louis 19 de Michel Poulette -, Martin Forget, Benoît Pelletier et Daniel Thibault, de dénoncer ce qui fascine ou fait damner bien des téléphiles.

Y aura-t-il quelque élément de critique sociale cinglante dans l’univers aseptisé du réseau Omni Global? Dénoncera-t-on les grands manitous de la télé dans les coulisses froufroutantes d’Idole instantanée, concours permettant à une illustre inconnue de devenir la star de l’heure en 24 heures? Eh non. Sans doute que l’on n’a pas voulu mordre la main nourricière.

Alors, plutôt que de se moquer directement des phénomènes ci-haut mentionnés, on crache sans égard sur les petites gens qui carburent à Star Académie ainsi que sur tous les Wilfred et Marie-Élaine de ce monde. Sans oublier les artisans de la télé que l’on veut nous faire passer pour une bande de frappés égocentriques et superficiels. Ce n’est tout de même pas eux qu’il faut blâmer pour ces fléaux!

Aussi, hormis le navrant caméo de Denys Arcand, le film semble s’adresser à des "couch potatoes" n’ayant aucune culture cinématographique. Pour les rassurer, on leur envoie donc en pâture des figures bien connues du petit écran, tels les journalistes Pascale Nadeau, Herby Moreau, Alexandra Diaz, Paul Toutant et Francine Grimaldi dans leur propre rôle (pour faire plus vrai!), de même que Guy A. Lepage et Sylvie Léonard en petit couple bcbg (quelle trouvaille, quand même!).

Ceci dit, la réalisation d’Yves Desgagnés, acteur et homme de théâtre respectable ayant signé de belles mises en scène de Tchekhov et de Shakespeare, se révèle tout à fait convenable et dénuée de temps morts. Desgagnés a le sens du rythme et de la comédie, c’est certain; toutefois, il aurait eu intérêt à demander à ses interprètes d’en faire un peu moins – on n’est pas au feu Théâtre des Variétés, bon sang!

Ainsi, à Louise Turcot, actrice pourtant nuancée en temps normal, on a envie de prescrire du Valium tant elle agace par son jeu hystérique. N’égalant pas le tour de force de Michel Côté dans Cruising Bar, l’humoriste Claudine Mercier compose quatre caricatures criardes dont aucune n’arrive à susciter l’empathie ni d’émotions, pas même Cat la rockeuse, sans doute le personnage ayant le plus de potentiel aux côtés de Manon la pitoune, Daphnée la matante et Mimi la pognée, ou encore de Simon Sirois, l’eunuque moustachu. Que l’on ne se surprenne pas si Christian Bégin y va d’une autre montée de lait… Au milieu de tout ce fatras de facture hyper-léchée, gracieuseté du directeur photo Éric Cayla, s’élève Maxime Denommée, suave à souhait en animateur de concours, hybride de Sébastien Benoît et Éric Salvail. Dites donc, la récolte des navets, c’est en juin?

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