The Soul Keeper : Une passion sans passion
Cinéma

The Soul Keeper : Une passion sans passion

Une mise en scène trop académique empêche The Soul Keeper d’aller au bout de son sujet et de plonger résolument dans les méandres de l’âme et de la passion amoureuse.

The Soul Keeper est l’histoire vraie de Sabina Spielrein, une jeune femme russe que Carl Gustav Jung a soignée à Zurich à partir de 1905. Elle deviendra au même moment sa maîtresse, avant de décrocher elle-même un diplôme en psychiatrie et de rentrer en Russie pour fonder une école. D’origine juive, elle sera assassinée pendant un raid de l’armée allemande en 1942.

Le film de l’Italien Roberto Faenza, tourné en anglais, est construit en deux temps. Le film débute à notre époque, alors que Marie, une jeune Française, se rend à Moscou pour en savoir davantage sur le destin de Spielrein. Elle est épaulée dans son enquête par un historien écossais avec qui elle se lie d’amitié. Parallèlement aux découvertes effectuées par la jeune femme, nous assistons par l’entremise de flash-back aux moments importants de la vie de Spielrein: sa thérapie, sa liaison avec Jung, puis son retour à Moscou pendant la révolution.

En plus d’évoquer l’histoire de cette femme importante pour Jung et pour son travail, le réalisateur veut illustrer la philosophie de Spielrein selon laquelle la passion (amoureuse, sexuelle) est l’énergie fondamentale de l’existence. Réprimer cette passion, c’est nier la vie. Voilà pourquoi elle cherchera à entraîner Jung dans cette relation qui les consumera tous les deux. Mais le psychiatre, socialement respecté, marié et sur le point de devenir père, se fera violence pour éteindre cette passion.

Or, cette passion n’est malheureusement nulle part dans le film de Faenza. Le réalisateur dépeint comme un premier de classe, mais sans grande conviction, l’histoire d’amour et évoque ensuite au pas de course le reste de la vie de Spielrein. Le sujet exigeait pourtant un traitement plus expressionniste, moins académique et à tout le moins plus charnel (on évoque ici Klimt après tout!). Pour entraîner le spectateur dans cette histoire, Faenza aurait dû pénétrer davantage les âmes des protagonistes et créer des situations plus déstabilisantes, plus déconstruites. Pour mille raisons plus évidentes les unes que les autres, ce film ne pouvait en aucun cas se contenter d’un traitement de téléfilm. Et pourtant.

The Soul Keeper ne laissera donc pas un souvenir impérissable. Par contre, le jeu incandescent d’Emilia Fox (The Pianist) permettra sans doute de susciter un intérêt pour Sabina Spielrein. Et là, au moins, le réalisateur aura atteint son objectif.

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