Les Temps qui changent : Souviens-toi de m'oublier
Cinéma

Les Temps qui changent : Souviens-toi de m’oublier

Les Temps qui changent, drame romantique d’André Téchiné, met en scène deux monstres sacrés du cinéma français qui ne s’étaient pas donné la réplique depuis Drôle d’endroit pour une rencontre, en 1988.

Qu’est-ce qui fait qu’un acteur de cinéma devient un monstre sacré? Sa gueule, son charisme, son talent? Sans doute un peu des trois. À défaut d’y répondre, Les Temps qui changent d’André Téchiné (Hôtel des Amériques, Les Voleurs) prouve que les stars mythiques, qu’on les aime ou non, exercent chez les cinéphiles une réelle fascination. De fait, comment résister à l’envie de revoir, 25 ans après Le Dernier Métro de Truffaut, Catherine Deneuve, actrice fétiche de Téchiné, et Gérard Depardieu se croiser devant la caméra? Toutefois, force est de constater qu’une aussi alléchante alliance ne suffit pas à rassasier bien longtemps le spectateur.

Antoine (Depardieu) n’a jamais pu oublier Cécile (Deneuve), son premier amour. Installé à Tanger pour superviser la construction d’un centre audiovisuel, il la retrouve 30 ans plus tard, mariée à Nathan (Gilbert Melki), un médecin juif séfarade plus jeune qu’elle, avec qui elle a eu un fils, Samy (Malik Zidi). Toujours éperdument amoureux, Antoine se met en tête de reconquérir Cécile, qui repousse ses avances en même temps qu’elle voit son monde lui échapper.

Récit d’un amour fou sobrement mis en scène, hormis quelques effets de style qui nous apparaissent comme des égarements ou des caprices, Les Temps qui changent est le genre de film qui séduit et agace à la fois. Ainsi, afin d’étoffer l’intrigue principale, le cinéaste et ses acolytes, Laurent Guyot et Pascal Bonitzer, ont concocté celle du fils homosexuel qui s’entête à vivre en couple avec une mère de famille monoparentale pouvant difficilement se passer de sa sœur jumelle (Lubna Azabal, aux prises avec deux rôles antipathiques). Un récit secondaire qui n’arrive pas à décoller et dont le développement se fait au détriment de l’analyse psychologique. Heureusement, Téchiné évite la légèreté et le babil inutile d’un Lelouch, sans pour autant atteindre la finesse d’observation d’un Sautet, afin de célébrer les retrouvailles d’un homme et d’une femme. Demeure l’interprétation de Depardieu, émouvant en amoureux fragile et fiévreux, et de Deneuve, bouleversante en épouse laissée pour compte qui cache sa sensibilité derrière un masque de froideur. N’est-ce pas le propre des monstres sacrés que de sauver la mise?

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